Aujourd'hui pas de train à vapeur ; c'est le bon vieux Oki que je récupère à Yuda Onsen pour m'amener dans la montagne. Direction Tsuwano, un village où je vais passer une merveilleuse journée.
On commence à sentir le paysage de montagne...
Une heure après, "Tsuwano desu" répète le contrôleur ; je descends ainsi qu'un certain nombre de Japonais.
Tsuwano a beau être une toute petite ville, de 8500 habitants (et compte tenu des statistiques japonaises, c'est vraiment peu), c'est une destination prisée, réputée offrir de nombreux sites à visiter aux voyageurs.
Un sanctuaire Inari célèbre dans tout le Japon, un autre temple dans la forêt, une chapelle des martyrs catholiques, un château avec un télésiège folklorique, des maisons d'écrivains, un quartier des samouraïs, un cadre naturel splendide. Bref, cela attire beaucoup de Japonais même si on y croise peu d'Occidentaux.
Je file à l'office de tourisme où une employée très prévenante m'aide à perfectionner mon programme et me remet, comme toujours, une masse de documents.
Pour le moment, l'urgence est comme toujours de me débarrasser du sac. Au Hoshi Ryokan, une charmante dame d'un âge certain me montre ma chambre déjà prête où je peux la déposer. Pour vous, suspense jusqu'à la fin de l'article.
Tsuwano est blottie dans la vallée où file la rivière, encerclée par les montagnes. Pour faire plus chic, quatre des sites que j'ai l'intention de visiter sont situés sur quatre monts différents. La journée va me faire les mollets. Et vider ma gourde. C'est une journée où je bois comme un trou ; hors des repas où je vide les pichets d'eau glacée, je remplis huit fois ma bouteille d'un demi-litre et j'achète deux boissons aux distributeurs. Tout fuit par les pores !
Je dois traverser la voie ferrée. L'endroit est très rustique, au sens étymologique.
Pour me rendre au temple et à la chapelle (pas très clairement localisée sur le plan, j'aurais dû consulter Google Maps avant pour éviter tours et détours), je dois longer des maisons presque à la campagne, avec des gens sympathiques qui me saluent quand je passe.
Un premier petit temple, conforme à la série, mais ce n'est pas celui que je cherche.
Le mien, c'est le Kazukan Yomei-ji ; une visite qui va m'enchanter !
Je poursuis sur un chemin entre village et campagne.
Ici, les tuiles sont vernissées et rouges, ça donne aux maisons un air de Sud de la France. En un peu plus foncé si on est tatillon.
Etape suivante pour une église catholique, toujours dans la forêt : Otome Maria Seido.
Encore un temple, à la toiture beaucoup plus évasée.
Des lanternes peu coûteuses.
Déjeuner dans le centre
Je reviens vers le centre ville, l'estomac dans les talons. j'ai déjeuné légèrement ce matin, la grimpette m'a creusé et il est plus de 13:00. Mais j'ai repéré un restaurant que je retrouve sans peine. C'est un établissement minuscule qui fait yakiniku, barbecue sur la table.
Bizarrement, alors que le yakiniku est bien plus onéreux, la serveuse souriante m'oriente sur le katsudon à 880 yens. C'est un bon conseil, même si je n'en ai jamais mangé de semblable.
Suite du programme : Maisons de samouraïs
Le quartier de Tonomachi, le cœur de la ville, était jadis squatté par les samouraïs qui voulaient tous y construire leur résidence. Tsuwano a bien préservé leurs habitations.
L'église catholique
Cette région fut un des hauts lieux du catholicisme japonais, comme les visites de Saint François Xavier à Yamaguchi et de la chapelle locale, ce matin, me l'ont rappelé. Je pense que la religion catholique est toujours vivace ; on voit ici une église au cœur même de la ville, plus proche de la rue principale qu'aucun temple.
Touchante dans sa modestie, elle ne parvient pas cependant au même charme que la chapelle au cadre magnifique.
Une église avec des tatamis, c'est une image rare.
Plaque signalant la persécution des Chrétiens.
Peinture sur la fenêtre : le jugement des Chrétiens accusés.
La maquette est plus rudimentaire que d'habitude. On voit un accusé ligoté à un poteau, à droite.
C'est très curieux, ce livre ; du japonais, mais en version romaji. Serait-ce une Bible pour prêtres étrangers qui devraient la lire aux fidèles ?
Le ruisseau qui coule le long de la rue héberge une foule de carpes de bonne taille.
La mairie s'est installée dans une de ces résidences. C'est la première fois que je vois des services municipaux japonais occuper un édifice historique ; la plupart du temps, leur préférence va à de vilaines constructions récentes.
Cette grande salle était utilisée pour l'entraînement des samouraïs.
Cette statue rend, une fois encore, hommage au Matsuri local ; durant le festival, les participants se déguisent en grue, l'oiseau, avec un volumineux chapeau. Leur danse dans les rues attire une foule considérable. Mais on me répète cela à chaque Matsuri ! Cela dit, d'après mon expérience à Okayama et à Kochi, je sais que les Japonais se déplacent en masse pour ces événements-là.
Sur les hauteurs
Le sanctuaire de Taikodani Inari demeure le site le plus fameux de Tsuwano même si son chemin de torii est moins célèbre que son alter ego de Kyoto.
En fait, je vais parcourir ce chemin à plusieurs reprises. Il m'a semblé, sur la carte, que la route vers le château se trouvait tout en bas alors qu'il me fallait sortir par le parking du sanctuaire. Je suis bon pour une nouvelle grimpette !
Je poursuis donc avec la visite des ruines du château, non sans avoir utilisé le télésiège d'un modèle inconnu. La descente est très spectaculaire... Je vous recommande cet article sur le Tsuwano-jisho.
Un petit visiteur que j'ai failli manquer ! L'éclaircissement de la photo m'aide bien, pour une fois.
Maisons d'écrivains
Deux gloires littéraires ont habité Tsuwano.La maison d'Amane Nishi
Amane Nishi était un brillant jeune homme qui, à vingt ans, devint professeur dans le Yorokan, l'école du clan Tsuwano.
Après l'ouverture du Japon provoquée par l'arrivée de Perry, il partit aux Pays-Bas étudier le droit, à l'université de Leyde. Ses nouvelles connaissances lui valurent d'intégrer le gouvernement de Meiji à son retour.
Passionné par la philosophie occidentale, il l'introduisit dans les cercles littéraires ; c'est d'ailleurs lui qui créa le mot philosophie en japonais.
La dernière maison qu'il habita ne révèle ni son importance littéraire ni sa noblesse (il était l'équivalent de baron), mais bien sa simplicité.
Voilà très longtemps que je n'ai pas vu ce système d'isolation avec des fétus de paille.
Pour la cuisine, on est limité à l'essentiel : un évier de pierre... Pas d'eau courante, mais un puits pas loin, c'est toujours ça.
Un brasero à même le sol pour faire bouillir l'eau du thé.
Un foyer pour la cuisson des plats.
Et c'est tout !
Un minuscule pavillon se tient dans un coin du jardin, mais les explications étaient seulement en japonais.
Je mets la photo, si quelqu'un peut m'aider, j'accueillerais avec plaisir les renseignements fournis. La traduction par image n'a rien donné de mon côté.
Ogaï Mori
La demeure d'Ogaï Mori, chirurgien et romancier, se visite aussi mais j'arrive trop tard ! J'ai seulement le temps de prendre une photo du musée qui inclut sa maison.
Voilà donc ce monsieur.
Diversification, comme chez Kawasaki : opticien, horloger, marchand de jouets, tout en un.
Dîner au Ryokan Hoshi
La douche est une priorité pour me rendre figure humaine. Je suis trempé jusqu'au bout des chaussettes.
Pendant la journée, on a installé le futon, c'est gentil.
Il y a même du thé vert en feuilles ; c'est rare !
Cuisine de la région, avec un excellent sashimi.
Une dame plus jeune que la mamie de ce matin parle un peu anglais et m'indique que je dois descendre pour le dîner. Tout est déjà prêt et disposé, bien sûr.
Il s'agit moins d'une cuisine kaiseki, comme c'est souvent le cas dans les ryokans, que d'un repas mettant en valeur les produits de saison. Les légumes sont rares et chers ici et je n'ai pas toujours eu de salade ces jours-ci. Je n'apprécie que davantage ces feuilles de scarole, ces concombres (qui, pour une fois, ne me reprochent pas). Les deux exquises myrtilles rachètent la pastèque, définitivement pas mon amie.
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