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samedi 28 août 2021

Rhodes : le Palais des Grands Maîtres

 

 L'extraordinaire Palais des Grands Maîtres, à Rhodes, rappelle la puissance de l'ordre des Chevaliers de Saint-Jean.


C'est à Jérusalem que fut fondé l'ordre des Chevaliers de Saint-Jean, tout d'abord pour protéger les pélerins qui se rendaient dans la ville sainte. Un ordre militaire tout d'abord.

Ensuite, il fut amené à les héberger et à les soigner, d'où le terme d'Hospitaliers de Saint Jean. Lorsque les Croisés furent chassés de Terre Sainte, en 1291, ils fuirent vers Chypre puis vers Rhodes où ils s'établirent en 1310.


Ils partirent ensuite pour Malte, où l'ordre des Chevaliers de Malte devint également réputé. Charles Quint leur accorda la souveraineté de l'île.  Ils ne cessèrent de s'enrichir et d'acquérir des prieurés et des commanderies dans l'Europe entière, et leur fortune s'accrut lorsqu'on leur octroya les biens de l'ordre du Temple dissout.

 

Pendant des siècles, ils se proclamèrent "rempart contre la barbarie", dernier bastion contre l'islam de l'empire ottoman. C'est un ordre militaire, il ne faut pas l'oublier.

Le Palais était une forteresse byzantine, qu'ils agrandirent et réaménagèrent. La vaste cour avec ses deux bandes d'arcades en plein cintre était le cœur du bâtiment. Le rez-de-chaussée se divisait en pièces de service telles que cuisines, magasins et écuries et l'étage était réservé aux pièces "nobles" et les appartements. Au-dessous, les trois niveaux de caves permettaient d'entreposer de quoi tenir des mois en vivres et en munitions. On était à une époque où les sièges étaient fréquents.

 

C'est Pierre d'Aubusson, grand maître de l'ordre, qui transforma la forteresse en retenant le gothique provençal si brillamment développé dans le Palais des Papes à Avignon. Les Provençaux tenaient d'ailleurs une hôtellerie à Rhodes.

Je commence la visite par le musée installé au rez-de-chaussée, sans doute dans les cuisines.


Le grand escalier d'honneur conduit directement à l'étage.

Un passage auparavant par la sobre chapelle...


On retrouve, un peu partout, le célèbre blason de l'ordre.

Les Mamelouks tentèrent de s'emparer de la forteresse à plusieurs reprises, et ils y parvinrent en 1522. C'est à ce moment que les chevaliers furent chassés et s'exilèrent à Malte.

Le palais connut diverses fortunes avant d'être restauré par l'Italie fasciste à partir de 1937, grâce aux plans incroyablement conservés. C'est assez difficile de mesurer la part de transformation ; on connaît les constructions mussoliniennes et leur côté froid et grandiose, et on retrouve un peu de cela dans ces grandes salles.

Peut-être était-ce déjà le cas à l'époque des chevaliers, je n'ai guère d'élément là-dessus. En tout cas, on a l'impression de visiter un superbe palais médiéval.

De nombreuses mosaïques, provenant des îles du Dodécanèse et surtout de Kos sont exposées dans tout le palais. Certaines sont absolument gigantesques !


Les Hospitaliers ont déserté les lieux depuis plusieurs siècles, il ne faut pas s'attendre à un intérieur tel qu'il l'était au Moyen-Âge. Quelques meubles sont présents, sans que je sache s'ils proviennent du palais.


L'élément le plus probant, et très frappant sur l'ensemble de l'intérieur, est cette alternance de blocs de plusieurs couleurs qui suffit à décorer les murs. Les encadrements de portes et de fenêtres sont très sobrement ornés.



L'ensemble est très spectaculaire : la salle est assez vaste pour accueillir une immense mosaïque de Kos (un véritable palais antique à n'en pas douter). La série de larges arcades successives rappelle beaucoup le Salo del Timell dans le Palau Reial Major de Barcelone, une réalisation de la même époque.

 

Vivante scène de chasse dans cette immense mosaïque. La succession de frises me rappelle toujours combien la structure des tapis doit à ces revêtements antiques.




Une série de vitrines accueille des documents liés au travail de l'archéologue italien qui étudia les mosaïques.


Le courrier estampillé Governo delle isole italiane dell'Egeo, Gouvernement des îles italiennes de la Mer Egée, rappelle la sinistre période mussolinienne.

Les archéologues sont de patients dessinateurs. Les relevés de mosaïques sont remarquables.


En revanche, je pense qu'on aurait pu recoller la photographie !

On pense que la salle des colonnades servait au conseil de l'ordre des chevaliers.

Chapiteaux et colonnes semblent attester le réemploi. Avant le palais byzantin, s'élevait ici un temple dédié à Helios, le dieu du soleil, déjà représenté dans la statue du Colosse. Il n'est pas impossible qu'on se soit servi sur place. Quant à la mosaïque, elle joue avec un motif d'entrelacs pas si fréquent.


Somptueux chapiteau composite. C'est la curieuse rencontre entre le chapiteau ionique, avec les volutes du rouleau de parchemin, et du chapiteau corinthien avec sa décoration de feuilles. Il a un peu souffert.




Alternance de styles, et je suppose une alternance d'époques.

Le nombre de cheminées reste étonnant. Je suis à l'étage noble, donc il est hors de question qu'elles aient servi ici pour la cuisine. Les hivers à Rhodes auraient-ils été si rigoureux qu'on dût prévoir autant d'âtres ?

Cette fois, le sol est couvert de carrelage, visiblement ancien même si je doute qu'il date du XIVe siècle. Cela ressemble à certains azulejos espagnols.


La série de salles suivantes héberge du mobilier occidental d'époques variées, qui ne doit rien au Palais des Grands Maîtres.


Je ne suis même pas certain que ces stalles proviennent du palais, même si l'ordre était religieux.









Le blason de l'ordre semble un peu trop restauré, mais quelle allure !

La salle des Muses tire son nom de cette fascinante mosaïque qui dépeint les neuf inspiratrices des artistes.






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