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mardi 17 août 2021

Mystra : églises médiévales (1)

 

Après la citadelle, je poursuis ma visite de Mystra en découvrant la ville médiévale et ses églises exceptionnelles.

 

La sécurité offerte par la fortification de Villehardouin assure une prospérité économique et culturelle. Alors que l'empire byzantin décline peu à peu, Mystra devient un éblouissant centre artistique. Gémiste Phaéton crée au XIVe siècle un enseignement philosophique basé sur les maîtres antiques, mais dont les orientations novatrices préfigurent l'humanisme. Le rayonnement de cette école attire la crème des intellectuels byzantins, les grands artistes et architectes qui viennent créer ici une nouvelle Byzance.

 

L'église Saint Sophie (Haghia Sophia)

Le terme de despote semble signifier davantage ici "prince byzantin" que "souverain autoritaire", d'après les recherches rapides que j'ai menées. En tout cas, la région de Morée où je me trouve n'utilisait que ce terme pour ses dirigeants. 


 

C'est l'un d'eux, Manuel Cantacuzène, qui fit construire cette église peu avant 1365, au sein d'un vaste ensemble monastique.

L'église est précédée d'un narthex à coupoles. Les fresques ont disparu, ce qui permet d'examiner la structure, apparemment rudimentaire, mais bien exécutée dans les règles.


 Elle adopte un plan à croix grecque qu'on ne perçoit pas tout de suite. Bien que sa voûte ne soit pas très élevée, l'étroitesse confère un sentiment d'espace vertical.


 La décoration au sol, une marqueterie de pierres, rappelle les pavements cosmatesques si prisés dans la Rom médiévale (allez, une au hasard, comme à Santa Maria del Trastevere).


On sait que la sobriété de ces intérieurs médiévaux est surtout créée par la disparition des fresques, mais celle-ci a une sorte d'épure solennelle qui me plaît beaucoup.


 

Toutes les fresques n'ont pas disparu, tout de même. Un beau Christ Pantocrator a été bien préservé.


La peinture, de très belle qualité, prouve combien Mystra avait su attirer artistes de valeur. Je suis trop ignare dans l'art byzantin pour assurer mes propos ; ce serait une fresque catholique, je dirais qu'elle correspondrait au courant d'humanisation du divin, où on abandonne le divin tout-puissant pour le rapprocher de nous.

L'expression, douce et légèrement mélancolique, est vraiment très réussie.



Et voilà ces trous de boulin qui m'ont surpris dans la citadelle ! Cette fois, ils correspondent davantage aux attentes.


Tout au long de la visite, des panonceaux apportent des informations sur la vie dans l'empire byzantin. Bien peu concernent ce que l'on voit directement et c'est dommage, cependant les informations sont fructueuses. J'apprends ainsi que les Byzantins construisaient toujours leurs cités près d'une source, et que l'eau était ensuite transportée ou déployée grâce à des aqueducs.

Je descends doucement vers le Palais des Despotes. Impressionnante construction.

Saint Nicolas (Aghios Nikolaos)

L'église Saint Nicolas semble avoir davantage souffert et pourtant elle a mieux conservé son patrimoine de fresques, plus récent il est vrai.



L'intérieur, plus lumineux, ne renouvelle pas l'élévation de Sainte Sophie. En échange, on est gratifié d'un univers plus coloré.

Je suis fasciné par ce mélange de modernité (pour l'époque, cela va sans dire) dans les traits et de tradition du modèle antique, dans la robe qui évoque la toge.

Pour l'interprétation, c'est une fois de plus mystère et boule de gomme. J'ai travaillé sur l'iconographie de Saint Nicolas à l'université et, en général, ce n'est pas ce cycle-là qui me pose le plus de problème. Ici je ne trouve pas les épisodes caractéristiques, même pas les enfants au saloir, ni les trois bourses. Une des scènes de guérison miraculeuse, peut-être. J'ai des doutes.

Un saint avec un livre, ça a toutes les chances d'être un évangéliste, mais les personnages ont perdu les attributs du tétragramme, ce qui me complique la tâche !

Il ne faut pas oublier les Pères de l'église, eus aussi souvent présentés avec un livre. Cependant celui-ci me paraît un peu jeunot pour l'emploi. 

La dormition du saint, au moins, ça c'est clair.





Ca avait toutes les chances d'être une Vierge à l'enfant avec série de saints au registre inférieur.


Vierge à l'enfant d'un côté, Christ Pantocrator de l'autre. En bas, une représentation de l'Enfer et du Paradis, liée au Jugement Dernier ?


J'ai retenu ce visage pour mon titre car il m'a vraiment interpellé. Expression un peu mélancolique, en tout cas inhabituelle. 

La tonsure m'oriente vers un moinillon, mais j'aurais bien retenu un Christ Emmanuel sans cet indice. Ce terme désigne les représentations de Jésus adolescent, comme on peut en voir un dans la Déésis de Vladimir-Souzdal à la Galerie Tretyakov de Moscou



Assemblée de reines et rois couronnés, mais garnis du nimbe. C'est vrai que des dirigeants ont été sanctifiés, comme Constantin ou Louis IX, mais je ne connais guère la liste byzantine...





Les pendentifs de la coupole sont ornés d'anges, et j'ai l'impression que c'est un élément traditionnel. En tout cas, j'en ai déjà remarqué dans des églises orthodoxes.


Le Palais des Despotes

C'est un ensemble saisissant, réalisé sur plusieurs époques. Le premier bâtiment sortit de terre vers 1245, mais le palais lui-même fut édifié vers 1350. L'ensemble était terminé au XVe siècle.

C'est en cours de restauration et on ne peut guère s'approcher, mais quel magnifique ensemble ! On a peu de témoignages aussi complets de l'architecture byzantine médiévale.



Les renseignements glanés brillent par leur médiocrité ; il y avait une salle du trône. Bon, mais quel palais médiéval ne comptait pas sa salle de réception ?

Dans une des parties, les femmes aimaient contempler le paysage. Ca me semble plus une vision romantique, façon Moyen-Âge troubadour, que la véritable fonction d'une construction.

Le seul élément patent est que c'est ici que vécut le dernier souverain de l'empire byzantin...

C'est bien curieux, cette arcade au-dessus de la fenêtre. Je pencherai pour une large baie ensuite rétrécie, comme le suscita chez nous l'impôt sur les fenêtres, mais il s'agit peut-être d'un élément décoratif. Je ne fais que livrer des suggestions, faute de mieux.

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