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lundi 30 août 2021

Rhodes : l'Hôpital des Chevaliers

 


Abritant le Musée Archéologique, l'Hôpital des Chevaliers est un magnifique témoignage de l'architecture civile du XIVe siècle, avec des chapiteaux bien originaux.

 Un hôpital novateur

Au-dessus de la porte d'entrée, un ange porte le blason de Fluvian de la rivière.

Les Chevaliers Hospitaliers de l'ordre de Saint Jean avaient une double fonction, militaire et hospitalière comme leur nom l'indique.


Pour accueillir malades et blessés, Antoine Fluvian de la Rivière, grand maître dès 1421, commanda la construction d'un vaste hôpital. Les travaux débutèrent après son décès, lorsque Jean Bonpart de Lastic avait pris sa place.

Cependant, comme au Palais des Grands Maîtres, c'est à Pierre d'Aubusson qu'on doit l'achèvement des travaux. La similitude de la cour apparaît immédiatement. Même principe aussi de division entre un rez-de-chaussée de service et l'étage. Toutefois, si au Palais les immenses salles se suivent en enfilade, ici on retrouve plutôt la répartition d'un monastère, avec des cellules non communicantes ouvrant toutes sur la galerie. 

Les combattants contre les assauts des Ottomans venaient ici recevoir des soins. Les hospitaliers jouissaient d'une grande réputation : bien formés, ils avaient bénéficié des progrès de la médecine arabe et les soins étaient largement supérieurs à ce qui était proposé en France à la même époque. Les malades les plus graves étaient isolés au lieu d'être allongés sur la paillasse commune, on changeait le linge tous les deux jours et on utilisait de la vaisselle en argent, réputé aseptisé. On octroyait au malade le pain blanc qui évitait les germes d'un pain bis grossier. Un véritable luxe à l'époque.

Le bain, à l'arrivée, était obligatoire ; une exception dans un Moyen-Age où on se lave peu ! La structure de l'hôpital permettait de mettre facilement en quarantaine des cellules, des parties, voire l'hôpital tout entier lors d'épidémies. La peste décimait alors l'humanité par vagues et l'isolement était encore le meilleur moyen d'éviter les catastrophes. On attendrait encore longtemps Louis Pasteur et ses vaccins salvateurs.

Le rez-de-chaussée

Les galeries du rez-de-chaussée sont voûtées d'ogives et on retrouve dans la sculpture des chapiteaux la même originalité stylistique que dans le Palais des Grands Maîtres. Le motif de corde tressée revient souvent pour unifier l'ensemble, mais les artistes s'en sont donné à cœur joie pour proposer une multitude de variations.





Le motif végétal stylisé se lit parfois plus clairement.



Au centre de la cour, surmontant la belle mosaïque à motif d'entrelacs, le lion antique garde fièrement les lieux.


Toujours le lion asiatique à crinière courte, animal presque totalement disparu. La pose de celui-ci me rappelle fortement le lion de Saint-Marc, à se demander si ce n'est pas ce type de statue qui a servi de modèle à l'emblème vénitien. Après tout, Venise s'est structurée sur son rapport à la Méditerranée.

Le rez-de-chaussée expose quelques autels en état inégal et fragment de statues.

Mais les boulets rappellent bien le souvenir des chevaliers.

Les salles de ce niveau ne se visitent pas. Elles ont retrouvé leur fonction d'entrepôt en abritant les réserves du musée. Comme toujours dans ce cas, tout n'est pas répertorié et il reste sans doute des merveilles à y découvrir !

L'étage


La galerie de l'étage était très spacieuse pour assurer la circulation de tout le personnel.

Elle s'orne, comme au rez-de-chaussée, d'originaux chapiteaux, qui assurent toute la décoration. Discrète et raffinée.
 

Les cellules, comme le Palais des Grands Maîtres, comptent un grand nombre de cheminées.


L'élégante porte ouvre sur la plus grande salle de l'étage.

Elle ressemble vraiment aux salles du Palais des Grands Maîtres ! Une ligne formée de sept piliers octogonaux supportant des arcades la divise en deux parties.

Il s'agissait d'une salle commune où on accueillait les blessés. On y pouvait y soigner une centaine de patients. Les malades contagieux étaient isolés dans des cellules dont on repère ici les portes étroites sur le mur.

Ses portes et son plafond étaient faits en cèdre, bois imputrescible bien adapté à un établissement de soins.




Le style est complètement différent dans cette arcature.



Si les piliers reçoivent les armes de grands maîtres, dont Pierre d'Aubusson, cette plaque porte le blason des Crispi et le Lion de Saint Marc que j'évoquais précédemment. Rien n'est indiqué pour expliquer sa présence ici. En tout cas, on peut facilement consulter la liste des grands maîtres de l'ordre, et elle ne compte aucun Crispi. Un butin de guerre est tout à fait improbable. 

Je présume qu'elle provient d'un autre bâtiment tenu par les Vénitiens. En tout cas, il ne détenaient pas d'hôtellerie en propre (ils la partageaient avec  les autres provinces de la péninsule), mais peut-être avaient-ils installé un comptoir de commerce. 

Comme bien souvent, j'en suis réduit à des hypothèses faute de documentation suffisante.
 

4 commentaires:

  1. Voilà le titre, il est très prometteur : des chevaliers, des malades, des palais magnifiques, des blessés très bien soignés qui apprennent l’hygiène. Tout est surprenant à cette époque. C’est un moment bouillonnant que j’apprécie avec Fred. Les photos sont un vrai plaisir.
    J’ai un grand plaisir pour cet historique haletant, passionnant, difficile à quitter.
    Je t’en remercie de tout mon cœur. Bisous. Mam

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    Réponses
    1. Comment ? Je n'ai pas répondu ? Honte à moi ! Un grand merci pour cet affectueux commentaire détaillé!

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  2. Très belle visite, avec d'intéressantes informations. Merci pour cette publication.
    Armel

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    Réponses
    1. Merci infiniment Armel pour votre chaleureux message !

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