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jeudi 27 août 2020

La ville antique d'Ostie (2)



Suite de la visite avec deux exemples de sanctuaires à Mithra, des thermes, une boulangerie...



Même s'il reste peu de ce temple, on en devine bien encore la structure et on peut l'imaginer, dressé en haut de la volée d'escaliers. Il fut érigé par les fabri tignuarii, des constructeurs, pour honorer l'empereur Pertinax divinisé. Celui-ci a donné un adjectif un peu oublié, pertinace, qui signifie obstiné.


Les cuves appartenaient à une fullonica, une blanchisserie-teinturerie. Ces établissements étaient indispensables dans les villes romaines pour s'occuper du linge. Cendres, calcaire et surtout urine, précieusement conservée, lui rendaient sa blancheur. On en visite une fameuse à Pompéi et j'en avais photographié une dans la ville souterraine de Barcelone.


Cette villa nous a laissé un luxueux pavement de marbre.


Le mithraeum de Felicissimus



Le culte de Mithra, divinité perse qui devint Ahura Mazda dans son pays d'origine, chez les Zoroastriens, remporta un succès fulgurant dans tout l'empire romain ; on a retrouvé une dizaine de sanctuaires dans la France actuelle. Diffusé à l'origine par l'armée, chez qui il était très populaire, son culte dura plusieurs siècles à Rome, avant que ses fidèles ne soient persécutés par les Chrétiens.

Le mithraeum est donc un temple dédié à Mithra. Ostie compte plus d'une quinzaine, un grand nombre donc ; en général ils sont de forme étroite et allongée, vague symbole de la grotte où le dieu serait apparu et deux banquettes étirées s'y font face pour accueillir les fidèles. Celui de Felicissimus est intéressant pour sa mosaïque, avec des symboles comme l'autel enflammé et le cratère (une sorte de verre) d'eau.

Les Thermes du nageur



Ce petit établissement de thermes était très complet, avec des salles de sport et la gamme complète de températures.


Après le frigidarium à l'eau froide, deux tepidaria à l'eau tiède, on pouvait choisir entre les caldaria, des vasques chauffées, ou un laconicum, un sauna.


 La mosaïque d'un nageur au milieu du frigidarium a inspiré les archéologues pour baptiser l'établissement.




Tout le quartier donne une bonne image de l'urbanisation romaine ;  on voit des demeures spacieuses, et certaines ont conservé colonnes et mosaïques.


 C'était un quartier où les cultes exotiques faisaient fureur ; outre les temples à Mithra, on en avait dressé à Cybèle (rebaptisée Magna Mater, la Grande Mère) originaire d'Asie mineure, l'actuelle Turquie.













Le sanctuaire d'Attis



Sur une place triangulaire (bien visible sur la reconstitution), on adorait des divinités qui n'appartenaient pas au Panthéon romain. Outre la Magna Mater, Bellone, déesse guerrière d'origine italique, avait droit à son temple.




Atys ou Attis, fils et amant de Cybèle (quelle histoire !) était honoré dans ce sanctuaire. Pas facile à reconnaître car il porte généralement son bonnet phrygien sur la tête. Ici, il est allongé après son émasculation et tient une grenade et une houlette. Sa coiffure, façon statue de la Liberté, est une représentation des rayons du soleil.




Tout près des Thermes du Forum, on pouvait pratiquer les activités sportives dans une grande palestre, entourée d'un portique à colonnes de marbre. De nombreuses boutiques permettaient de faire son shopping tout autour.






Quelques colonnes corinthiennes de marbre témoignent du luxe des équipements. Je suis certain qu’ils ne cédaient rien à nos établissements thermaux.





La salle à manger comportait toujours un triclinium, des banquettes disposées en fer à cheval pour pouvoir y dîner allongé. Le service se faisait au centre.

Ici elle appartenait à un édifice de la corporation des constructeurs qui y tenaient leurs banquets.


Un petit forum près de cet édifice était décoré d'une statue héroïque, aujourd'hui décapitée, hélas.



La reconstitution permet de mieux s'imaginer ce grand complexe thermal avec ses multiples salles.



On retrouve les mosaïques marines qui firent fureur dans toute la ville.


Neptune chevauche fidèlement son char.


Et justement on est en train de les restaurer. J'en profite pour discuter un peu avec l'experte.


On peut un peu mieux reconstituer la hauteur par la pensée.






Le mithraeum des serpents



Le mithraeum des serpents fut installé au IIIe siècle dans un immeuble qui comprenait déjà des habitations et des commerces, et plus précisément dans une arrière-boutique.


On retrouve les longues banquettes, mais la décoration des serpents est étrangère au culte de Mithra. Il s'agit sans doute d'un lararium, autel pour honorer les dieux lares (les divinités de la maison) qui fut conservé dans la transformation de la pièce.




C'est ici qu'on avait basé la forteresse à l'origine d'Ostie, un castrum qui défendait le Tibre. On y édifia au IIe siècle un temple républicain qui profitait d'une position de choix car directement ouvert sur le Decumanus Maximus, l'avenue principale. Il me paraît vraiment tout petit !



Les grands Horrea



La vocation d'Ostie, c'est donc la réception des marchandises et le commerce, ce qui demande de vastes entrepôts. Il fallut en construire plusieurs, et certains sont bien mieux conservés que ceux-ci, qui demeurent cependant les plus grands.

Les magasins formaient un rectangle autour d'un portique (on voit les bases des colonnes) et ils s'élevaient sur trois niveaux où les dockers entassaient les biens importés dans des pièces séparées, les cellae.



La boulangerie de Silvanus



Comme à Pompéi, on a conservé ici plusieurs boulangeries, un des commerces indispensables à la vie de la cité. C'était une entreprise à plusieurs étapes, puisque le boulanger ne recevait pas de farine mais des grains qu'il fallait moudre.


On versait les grains dans l'ouverture du haut, qui tournait sur un cône. Les orifices sur les côtés permettaient d'y ficher des bâtons, tirés par des animaux ou par des employés ou des esclaves.

Comme la meule était en pierre volcanique, elle se désagrégeait peu à peu et la farine contenait toujours un peu de pouzzolane. Cela explique les dents limées découvertes sur les squelettes des Romains !


Un espace était réservé à la préparation de la pâte à pain. Les miches retrouvées carbonisées à Pompéi ressemblent beaucoup aux nôtres, avec leur fente en croix.


Dernière étape, la cuisson au four à bois.


L'entreprise, accolée aux grands Horrea, bénéficiait de la large clientèle des employés. Aussi ne faut-il pas s'étonner si la boulangerie avait six boutiques !

Le nom de Silvanus n'est pas celui du boulanger ; mais un passage souterrain de la boulangerie fut transformé au IIIe siècle en lieu de culte de Silvanus (Sylvain), divinité des bois.
 

3 commentaires:

  1. Article aussi passionnant que le premier. Des mithraea remarquables, une boulangerie exemplaire, et toujours vos commentaires justement dosés pour apprécier la visite.
    Merci, je suis ravie de continuer la visite.
    Michèle

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    Réponses
    1. Merci beaucoup Michèle ! C'est vrai qu'Ostie est un site formidable à visiter.

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  2. Amazing town from Antiquity! Great texts to understand your beautiful pictures.
    Annie

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