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jeudi 27 février 2020

Moscou : Les Fiançailles au Couvent (Stanislavsky)


Une représentation épatante : excellente production, interprétation remarquable. Le rêve !



J'adore Les Fiançailles au Couvent (Обручение в монастыре, également connu sous la traduction anglaise Betrothal in a Monastery). Le livret est basé sur une pièce de Richard Sheridan, The Duenna, qui se passe dans une Espagne de fantaisie et raconte les aventures de jeunes gens pour déjouer les projets matrimoniaux de leurs aînés. Un de ces derniers épousera la Duègne au lieu de la jeune promise.
Sur ce livret souriant, Prokofiev a écrit une musique merveilleuse d'esprit et d'ironie, de comique léger, avec sa science de l'orchestration. Un vrai bijou du XXe siècle.


J'ai eu la chance de voir la pièce à Londres, au début des années 1990, avant de voir la première représentation de l'opéra, une tournée du Mariinsky à Montpellier avec une jeune inconnue, Anna Netrebko.

Ce n'est pas un opéra si souvent donné en France, mais j'en ai vu tout de même trois autres représentations chez nous. Le reste est à l'étranger, notamment à Berlin. Et ce soir, c'est la première fois que je le vois en Russie.

Fameuse production d'Alexander Titel



Cette production est au répertoire du Stanislavsy depuis une vingtaine d'années et elle est devenue très célèbre ; on en voit souvent des photos sur les livres et les articles consacrés à cet opéra.


Le décor est essentiel ici : il est rempli de moulins à vent, sur les côtés, qui descendent et qui montent des cintres.

Ils modèlent l'espace de manière différente selon les scènes, sont dotés parfois d'une fonction précise (fleurs à tailler, hélices de l'avion pour la fuite). Ils tournent ou sont immobiles selon les moments. Je pense que les responsables techniques ne doivent pas s'ennuyer avec ces multiples commandes à gérer !


Le comique est essentiel ici. Les gags ne manquent pas, comme ce Don Carlos figé dans son armure, bras désespérément levé, qu'on déplace sur ses roulettes.



Mais surtout, le spectacle est animé par beaucoup de gaité, grâce à l'introduction de la commedia dell'arte (figurants, acrobates, choristes) dans l'œuvre. Certes, c'est de l'Espagne qu'il s'agit, mais la localisation spatio-temporelle n'a guère d'importance ici !


La distribution



Les Fiançailles au Couvent, c'est avant tout un opéra de troupe qui réclame des rôles nombreux. Ici, on est servi, même dans les rôles les plus nombreux. Les moines qui chantent les mérites du vin et dansent joyeusement sont assurés par des chanteurs tous remarquables, avec des voix très timbrées et projetées. Le Padre Augustin se caractérise par sa voix énorme, extrêmement large. Félicitations à Felix Kudryatsev !


Je retrouve la majeure partie de la distribution de Traviata, l'an dernier ici. Evgeny Polikanin, le Germont précédent, incarne un hilarant Don Carlos, impeccablement chanté.


Le couple Clara-Ferdinand est tenu par de brillants Irina Vaschenko et Dmitry Zuev, parfaits l'un et l'autre. Le timbre charnu de la mezzo (quelle voix !) se complète de la voix claire et dorée du baryton.


Grand succès aussi pour le duo comique de la Duègne et de Mendoza, tenu par les excellents Natalia Zimina et Roman Ulybin. Outre leurs qualités vocales (richesse des timbres, maîtrise de la dynamique, exploitation d'une technique solide), je leur sais gré d'une interprétation extrêmement comique, mais mesurée, avec une réjouissante dimension parodique. Bravo.


Valery Mikitsky est un épatant Don Jerome. Outre que sa voix de ténor bouffe convient parfaitement au personnage, c'est un acteur-né !


Le jeune couple Antonio-Louisa est une des merveilles de la soirée. J'y retrouve le couple de Traviata de l'an dernier, les excellents Vladimir Dmitruk et Maria Makeeva. Les deux chanteurs font preuve d'une maîtrise technique impeccable et la beauté des timbres, la variété des couleurs, la fraîcheur de l'interprétation ne peuvent que conquérir le public. Le charme incarné.





La soirée est dirigée par l'ancien chef du Bolchoï, Alexander Lazarev, bien connu pour ses tournées mondiales et ses invitations avec de nombreux orchestres. Il apporte évidemment la précision souhaitée et a l'œil et l'oreille à tout, mais il offre dans la fosse tout l'esprit et la finesse humoristique attendue. Sans doute un vrai maître d'œuvre pour cette soirée si réussie.


Felix Kudryavtsev

avec Maria Makeeva et Vladimir Dmitruk

avec Valery Mikitsky

2 commentaires:

  1. Never heard about this opera. I will make a research...
    But thank you for this lovely post!
    Annie

    RépondreSupprimer

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