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mercredi 31 juillet 2019

Tokyo : musée et jardin Nezu


Depuis que je visite de expositions d'art asiatique, le nom de Musée Nezu revient régulièrement. Il figurait sur ma liste depuis mon premier voyage à Tokyo, mais il y a tant à voir dans cette ville !

Le musée est basé sur la collection privée du fondateur de la ligne Tobu, Nezu Kaichiro. Il ouvrit en 1941 mais la guerre ravagea ce nouveau lieu d'exposition ; heureusement, une partie de la collection avait pu être mise à l'abri. On sauva environ quatre mille pièces, et on ne cesse depuis de l'enrichir puisque leur nombre est approximativement doublé aujourd'hui.



De 2006 à 2009, le musée fut entièrement reconstruit sous la direction de Kengo Kuma. Sa particularité est d'avoir aussi préservé un morceau de forêt (on parle ici de jardin, mais j'ai vraiment eu le sentiment de me promener en pleine nature) et d'y avoir dispersé des œuvres, comme on peut en voir dans les temples dans la nature au Japon. Je suis un peu surpris que des pièces anciennes soient ainsi exposées aux éléments ! Malgré le beau bâtiment du musée, j'ai trouvé l'espace assez réduit. La muséologie est remarquable, mais on y voit  assez peu de pièces. Je me suis finalement plus régalé dans le jardin.

On a le droit de photographier dans le jardin (je précise car ce n'est pas toujours le cas) mais dans le musée, cette autorisation est limitée à la grande salle du bas. Pour montrer quelques autres œuvres, je suis allé puiser sur le site du musée...



Le musée



La grande salle ouvre sur le jardin européen, ce qui offre un arrière-plan verdoyant mais également un redoutable contre-jour pour les photos !

Bouddha Maitreya, dynastie de Kushan, IIIe siècle

Je trouve à cette magnifique statue un style du Gandhara, cet art bouddhique mêlé d'héritage grec.

Tête de Bouddha, grottes de Tian Long Shan, Dynastie des Qi du Nord, VIe siècle

Après le visage creusé, à l'européenne, une tête ronde de l'Extrême-Orient.

Tête de Bodhisattva, grottes de Tian Long Shan, Dynastie des Qi du Nord, VIe siècle

Belle expressivité. Sérénité.

Tête de Bouddha, grottes de Tian Long Shan, Dynastie des Qi du Nord, VIe siècle

Tête de Bodhisattva, grottes de Tian Long Shan, Dynastie des Qi du Nord, VIe siècle

Guanyin, Temple de Bao Qing Si, Dynastie Tang, VIIe siècle
 Grande délicatesse dans l'ornementation.

Pilier avec représentations de Bouddha, Chine, Dynastie des Wei du Nord, VIe siècle
 Toujours la même époque, mais un autre courant stylistique.

Triade de Bouddha, Chine, Dynastie des Wei du Nord, VIe siècle

Représentation classique de la triade. On voit un fragment de mandala derrière ; je me suis toujours demandé s'il y avait un lien culturel avec l'aura de nos saints, vu le même fonds indo-européen et la richesse des échanges par la route de la Soie depuis l'Antiquité.

Triade de Bouddha, Chine, Dynastie des Qi du Nord, VIe siècle

Très beau groupe, bien composé. Si je poursuis ma comparaison, triade et trinité... feuille de lotus et mandorle... Les similitudes sont frappantes, non ?

Statue de Bouddha, Chine, Dynastie des Qi du Nord, VIe siècle

Magnifique dans l'expression de la quiétude et dans l'épure des moyens. Je continue ma réflexion. Notre Moyen-Age plus tardif a pu aussi produire de splendides statues de saints pas si éloignées, des Saint Jean, par exemple... Et chez nous aussi, on loue souvent la qualité du drapé !

Statue de Bouddha, Chine, Dynastie des Qi du Nord, VIe siècle (détail)


Cloche de temple, Corée, Dynastie Cheoson, 1690

Une cloche gigantesque venue de Corée. Heureusement qu'elle est datée, la Dynastie Cheoson se caractérisant par sa durée !

Cloche de temple, Corée, Dynastie Cheoson, 1690 (détail)

 A partir d'ici, voici quelques images du site du musée. Les premières concernent l'exposition Bouddhas de compassion et divinités infernales, qui permet de bien juger de la diversité expressive des représentations.

Vaisrarana, Japon, période de Heian, XIIe siècle

Une des divinités protectrices des points cardinaux, qui change de nom lorsqu'on la représente seule.


Les deux images qui illustrent l'affiche, détails d'Amitabha et de Ragaraja. La dualité entre bon et méchant, Enfer et Paradis, compassion et cruauté, a construit beaucoup de religions, et c'est un poncif que d'y voir aussi la tension de la nature humaine.



Triade de la descente d'Amitabha,
Japon, période de Kamakura, XIVe siècle

C'est notre Paradis ; Amitabha accueille les "bons" et les conduit dans l'au-delà, en simplifiant grossièrement.

Vajrayaksa, Japon, période de Kamakura, XIIIe siècle

Autrefois affreux qui dévorait les humains, Vajrayaksa se chargea ensuite de détruire les divinités malfaisantes.

Ragaraja, Japon, période d'Edo, XVIIe siècle

Cette statue était vénérée lors d'une cérémonie visant à inverser les forces négatives.

Amantakya, Japon, Période de Kamakura, XIIIe siècle

Ragaraja, Japon, Période de Kamakura, XIIIe siècle

Le rouge, couleur du feu, des flammes de l'Enfer. Encore un symbole qui a traversé les frontières.

Amida, Corée, Dynastie Koryo, XIVe siècle

C'est peu fréquent de voir des peintures coréennes de cette période. Magnifique réalisation.

Jizo-bosatsu, Japon, Période de Heian, XIIe siècle

Miroir aux perruches et grapes de raisin, Chine, Dynastie Tang, VIIIe siècle

Dommage, un seul miroir est photographié sur le site ! La collection exposée en montrait bien davantage : que des merveilles.

Plats, Japon, Période Edo, XVIIe siècle

Ces pièces qui se disputent le prix de créativité me rappellent l'extraordinaire musée de céramiques à Osaka, un de mes favoris au Japon.

Plat de bon augure, Japon, Période Edo, XVIIe siècle

Bol aux fruits blancs, Dynastie Qing, XVIIIe siècle

Plat au magnolia, Chine, Dynastie Qing, XVIIIe siècle

Bol aux poissons rouges, Dynastie Qing, XVIIIe siècle

Design renversant de simplicité !

He avec motif Taotie, Chine, Dynastie Shang, XIIIe siècle -J.C.

L'Antiquité chinoise était très avancée ; la maîtrise du métal était remarquable, et ces grandes pièces avec une décoration en relief furent produites en quantité. Les He servaient d'encensoirs.

Zun avec motif Taotie, Chine, Dynastie Shang, XIIIe siècle -J.C.

Zun, Chine, Province de Hunan, XIIIe siècle -J.C.

Ce vase au double bélier reste une vraie rareté, on ne connaît qu'une pièce équivalente, au British Museum.

Yi avec motif Taotie, Chine, Dynastie Shang, Xe siècle -J.C.

Le jardin



Dommage que le jardin ne soit pas climatisé ! Mais c'est bien un des rares  reproches que j'aie à faire. Sans les allées, on aurait tout à fait l'impression de se promener en pleine nature et non au cœur d'une mégalopole.


Si, quand même, seules certaines statues sont légendées. Il semble que la majeure partie date de la période de Heian, mais sous toutes réserves ! Je suis incapable de différencier original et copie.


Les lanternes éclairaient les chemins des temples lors des pèlerinages nocturnes. C'est devenu un des symboles du jardin japonais.




Dommage, la mare ne se caractérise pas par sa limpidité !



On repère sans peine l'usure de certaines statues, ce qui leur ôte sans doute de la valeur mais pas du charme. Je suis étonné de la coiffe de celle-ci.


La pagode à degrés existe en version réduite. Modèle courant dans les petits jardins de Kyoto.


Même si le jardin ressemble à une forêt, on y a dressé une maison de thé !




Détail du pilier précédent, avec un Bouddha un peu érodé et cependant tellement expressif !






Mon premier érable qui vire vers le pourpre ! C'est une obsession chez moi. Comme il est peu probable que je voyage au Japon à la saison des momiji, quand ces arbres s'habillent de rouge, je guette tous ceux qui s'en approchent.




La plus grande statue du jardin me paraît aussi une des mieux conservées, avec un drapé qui me semble baroque. En l'absence de toute indication, je me risquerai à parler de période d'Edo, mais je répète, c'est avec les réserves qui s'imposent.





Ici aussi il s'agit de pagode, mais limitée à l'essentiel.




Voilà ce qu'on imagine, en Europe, avec le terme de pagode. En fait, en Asie, cela peut même désigner un temple sans élévation.


Une pousse sur un tronc, l'art au naturel.


Celui-là aussi me plaît beaucoup ! A la fois très simplifié et un vrai personnage.





Un torii indique l'entrée d'un temple ou d'un sanctuaire au Japon. Ici, c'est la seconde possibilité, plutôt modeste.


Les komainu, les lions protecteurs, montent la garde.



Il suffit de regarder en l'air pour se rappeler qu'on est bien resté en plein centre-ville. Ça fait beaucoup de bien, cette promenade au milieu des arbres !


En remontant vers le musée, je retrouve la pelouse européenne qui le bordait. Un vrai gazon anglais !


3 commentaires:

  1. Peaceful Bouddhas + Quiet green forest =another great article!
    Annie

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  2. Un grand nombre de têtes de Bouddha, très différentes les unes des autres, magnifiques, ainsi que les triades et sculptures chinoises pour commencer la visite. Je suis admirative devant tout ce qui est exposé, surtout de ces époques très anciennes. Puis le jardin invite à la promenade et à la sérénité. J’adore ces jardins japonais, celui ci avec ces statues érodées à un certain charme car la nature y est omniprésente.
    C’est un article très varié avec beaucoup de découvertes. Merci de m’en faire profiter.
    Bisous. Mam.

    RépondreSupprimer

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