Translate

mardi 21 août 2018

Kyoto : Hokongo-in, Myoshin-ji, Ninna-ji


Plus qu'un jour à Kyoto ! Trois nuits, c'est vraiment trop peu. J'avais raccourci un peu mon séjour ici en prévoyant mon itinéraire, mais je suis finalement frustré. Je tenais absolument à retourner au Ninna-ji, mon temple préféré de tout le Japon, et il m'a fallu marcher un bon peu pour au moins emprunter les grandes avenues du centre. Je n'ai même pas mis le pied à Pontocho ni à Gion, ces Mecques du tourisme, c'est dire. Au prochain coup, il me faut absolument prévoir cinq nuits comme les fois précédentes, tant pis. Kyoto demeure une des villes qui a le plus à offrir.



Ce matin, je déjeune dans la petite salle en compagnie d'un couple de Chinois, peu ou prou de mon âge. Nous nous sommes croisés hier et nous sommes souri poliment, c'est tout.

Le repas est l'occasion de partager. Mes biscuits Gerblé français et mon chocolat au lait sont une source d'étonnement : ils n'ont jamais rien vu de pareil. Je leur fais goûter mes denrées, ils ne connaissent pas le chocolat ! Eux, de leur côté, me proposent leurs délices, riz avec une sauce très salée et poissons séchés avec des morceaux verts, gluants. Un légume inconnu dont ils me montrent la photo sur leur téléphone.
Nous rions de concert à ces découvertes respectives. Leur anglais est très très basique cependant ils produisent des efforts considérables, qui nous permettent de comparer nos visites. Eux se limitent à Tokyo, Kyoto et au mont Fuji, programme standard pour une majorité de voyageurs. Cela faisait longtemps que je n'avais pas rencontré de Chinois aussi sympathiques !

Cela dit, cette rencontre m'a pris un certain temps et je ne quitte l'hôtel qu'à 10:30. J'abandonne mon idée de tout faire à pied et file à la gare. La ligne San-in me dépose à la station Hanazono, en face de mon premier temple.



Hokongo-in 





Le Ministre du droit Kiyohara no Natsuno avait fait construire une villa en 824, souvent fréquentée ensuite par les empereurs. C'est en 850 qu'on y établit un monastère, le Tennan-ji, qui déclina progressivement. Mais en 1129, l'impératrice Taikemon-in le restaura, ajouta la mare aux lotus, y fit placer les grandes statues. Ce n'est pas non plus cette version qui a subsisté, un tremblement de terre saccagea les structures en 1573. C'est en 1615 que s'acheva la reconstruction.
On voit donc un temple du XVIIe siècle, comme c'est souvent le cas.




Ce n'est certes pas un temple prioritaire dans une première visite à Tokyo, mais je tenais à voir ce lieu bouddhiste.






Malheureusement, cet été la pluie est rarement tombée à Kyoto et les mousses souffrent particulièrement. La cascade a cessé de couler.






Ici les jizo sont bien curieux : ils portent bien le bavoir rouge, couleur de protection et de sécurité, mais certains semblent avoir perdu la tête. D'autres sont épurés au point de ressembler aux lingam.

Le Boddhisattva Jizo avait juré de protéger les enfants morts trop tôt pour amasser assez de bonnes actions pour être réincarnés ensuite. Gardiens des défunts dont la tombe a été oubliée, leur bienveillance s'étend jusqu'aux voyageurs.
Les jizo s'exposent souvent en groupe et les collerettes sont presque toujours faites main.

Comme par un fait exprès, ce matin, des averses impromptues troublent ma visite. Bref je ne le vois pas dans les meilleures conditions. 500 ¥ le billet, le tarif courant.



La statue d'Amida est bien l'original de 1130. Le sculpteur Inkaku reçut une promotion (hogyo) pour sa réalisation. 
C'est intéressant de comparer avec celle du Byodo-in d'Uji, puisqu'elles sont contemporaines, de la période d'Heian. Le code semble respecté et cependant chaque artiste a su s'exprimer.


La statue de Kannon, de 1316, est l'œuvre de trois sculpteurs. C'est une très rares munies de quatre bras.



Le Bouddha de la Sagesse, Manjusri, est représenté en moine et c'est aussi en jeune moine qu'est figuré un Boddhisattva.



Quelques rues plus haut et voici déjà ma seconde étape. 

Myoshin-ji






Comme le Daitoku-ji, il ne s'agit pas d'un temple mais d'une vraie ville dans la ville. 
La longue enceinte, clôture seulement percée de deux portes, protège le temple principal et quarante-sept temples annexes.






L'ensemble date de 1342 et appartient, une fois encore, à l'école Zen Rinzai, le principal mouvement monastique.












Beaucoup ne se visitent pas ; toutefois une grande majorité laisse la porte barrée, mais béante, si bien qu'on peut se faire une idée du jardin.



C'est une visite très agréable. A deux pas de la circulation intense, on est vraiment coupé du monde. Corbeaux et insectes stridulants assurent l'essentiel du fond sonore. Les rues ne sont pas piétonnes, il y a même quelques parkings, mais on n'est guère dérangé. On est entré dans un univers tranquille et harmonieux, très plaisant.






Keishun-in




Fondé en 1598, c'est un temple dont le pavillon, original, remonte aux années 1630. Pas très grand, il est pourtant muni de tous les agréments nécessaires : une très charmante réalisation miniature, avec un délicat jardin de mousses.




Son jardin semi-sec, le Shojo, est intérieur. Il est supposé évoquer une cascade mais cela fait grandement appel à l'imagination. Cela dit, c'est peut-être voulu, ces jardins secs symbolisent toujours du concret (animaux, paysages, éléments naturels) qu'on doit parvenir à retrouver par la méditation. Pour les cascades, m'avait expliqué un moine il y a deux ans à propos des vagues du Zuiho-in, cela marche quand on entend le bruit de l'eau.



La salle de thé, le Kihaku-an, provient du château de Nahagama. Je ne vois pas bien ce qui a été transporté... Ce qui est présenté tient dans une malle ! Elle est excentrée car c'est un ajout tardif. Les moines Zen devaient strictement respecter la règle, qui ne prévoyait pas des distractions aussi infamantes que la cérémonie du thé. Attention, sous peine de mort !

La brochure en anglais ne comprend pas de plan et ne suit pas les parties dans l'ordre : je suis un peu perdu. Une famille française se matérialise providentiellement, mais le père m'avoue qu'aucun d'eux ne lit les brochures, qu'ils se contentent de prendre des photos. "De toute façon on s'en fout". Charmant.

Tant pis, je vais demander de l'aide à l'aimable vendeuse de tickets. Évidemment, elle abandonne aussitôt son poste pour voler à mon secours. Sans un mot d'anglais. C'est parfois rocambolesque mais je réussis à localiser les parties et à comprendre quelques éléments distillés dans un flux continu.


Sous réserve que j'aie bien saisi, il y a ici une histoire concernant la quantité de tatamis. L'hôte se tient normalement dans une posture codifiée sur un demi-tatami (la posture s'appelle dayme, orthographe non garantie) et son invité sur deux autres, mais ici la quantité est de trois et demi. Si on enlève le demi-tatami du seuil, qui ne compte pas, il reste donc ici  un tatami entier pour l'hôte, qui peut profiter tout à son aise.





Le Hojo, le pavillon principal, est divisé en espaces réservés à l'étude et à la prière. Les peintures sur les fusuma sont d'origine.


Le jardin extérieur, célèbre à l'automne pour ses momiji, ses érables qui s'empourprent pour le grand bonheur des Japonais , se compose en fait de trois.


Le Wabi, réservé à l'agrément de la salle de thé.



Le Shii, où les pierres symbolisent... (je n'ai pas saisi s'il s'agissait de prêtres, de divinités ou de créatures merveilleuses).






Et le Shinyo, où il faut visualiser trois niveaux superposés (symbole de...???), la mousse et les racines (ça, je comprends, umi, la mer), les rhododendrons (je coince, mais dans le lot il y a nishi, l'ouest), la voûte des érables (tengoku, le ciel). Pour le symbole général, j'avance uchu, l'univers, mais non non non, ce n'est pas ça du tout.
Quant à la brochure, elle me fait penser à une réplique d'une pièce de Courteline concernant le dictionnaire, "on n'y trouve que ce dont on n'a pas besoin".

Bon, je regrette vraiment de m'en être tenu à mes misérables lambeaux de japonais ; je confirme  à la dame que j'aime beaucoup son temple et je la remercie, avec force courbettes, Harigato gosaimashta du coup. 

Myoshin-ji ? 






Si j'ai également bien compris, le deuxième temple avec visite payante est le Myoshin-ji lui-même. C'est clair pour le grand pavillon (photos strictly forbidden), beaucoup moins pour celui avec la cour fermée où j'ai acheté le ticket.




Je n'ai encore jamais vu cela. D'ordinaire, ces cônes qui symbolisent des montagnes surmontent une mer de sable, mais ici, c'est visiblement d'un parterre de mousse qu'il s'agit. Peut-être faudrait-il employer le passé car la sécheresse semble l'avoir mise à mal.



La brochure en japonais ne m'a pas servi du tout, indéchiffrable, hélas !
Belle visite en tout cas. 

Heure du repas


Je suis très content de trouver un petit restaurant de quartier, où déjeunent deux agents et où beaucoup de collégiens viennent chercher des sacs tout prêts, leur bento, je suppose. Quelques photos au mur, des noms en japonais. Je prends le plat dont, à la longue, je finis par savoir lire le nom, le tonkatsu. J'ai toujours aimé les escalopes panées, plat heureusement mondial, et ici, en prime, c'est l'assurance d'avoir de la salade. Aussi bon qu'économique, 850 ¥.

Je repars vers ma troisième destination.


Une marque de vélo française ?


Petit jardin de succulentes, cette fois.

Ninna-ji 


Je sais, c'est la troisième fois que j'y viens. C'est le temple pour lequel j'ai eu un vrai coup de foudre à ma première visite, et la seconde a été un vrai bonheur. La troisième me fait le même effet : beaucoup d'admiration devant la qualité de l'architecture et des peintures, et un extraordinaire sentiment de plénitude devant les jardins. L'impression d'être en harmonie devant la beauté du monde. Et, je le répète, c'est le seul temple où je vois autant de gens rester assis, en silence, à contempler.

Je ne vais pas recopier mon précédent bla-bla historique, on peut le trouver , ni replacer des photos, puisque mon précédent article en était abondamment garni.

Je propose donc quelques vidéos qui donnent peut-être une meilleure idée de l'espace.













Un selfie dans mon temple préféré. 






La grande nouveauté, c'est que le Kondo, le hall de prière, est entièrement restauré. Je l'ai toujours vu sous voile.


Quant à la pagode, toujours le même effet de masse et d'élévation tout à la fois.

Je ressors revigoré. Si j'ai la chance de revenir à Kyoto, c'est sûr,  le Ninna-ji sera encore sur ma liste !



Pour me donner l'impression d'avoir vu un peu de Kyoto, je descends à pied vers le centre-ville. Le quartier charmant et paisible avec ses petites villas fait bientôt place à de grands boulevards animés.


A l'heure magique du couchant qui dore les façades, il tombe sur de médiocres immeubles. Pas de chance !

Dîner




Je me précipite pour le repas avant d'atteindre l'hypercentre et ses files d'attente devant les restaurants. Un bon donburi, où le riz, chose rare, est mélangé à de l'oignon et de l'ail frits, avec une touche de miso rouge. Fraîche salade, vinaigrette miso, et soupe au miso encore, blanc cette fois. Un repas à thème, donc.

Un dernier High Ball. Plus de ces merveilleux agrumes de Kyushu, hélas, mais un citron jaune plus ordinaire. Cela demeure une boisson très agréable.



Un dernier passage sur Karasumadori et ses prestigieux immeubles, puis sur Shijodori tout illuminé avec sa série de grands magasins.

Rayon autel particulier. 

Pour les grands événements.  

Rayon cartomanciennes. 

Un café chez Doutor avant de rentrer !


 Ce soir, du boulot. Outre le blog, je dois commencer l'optimisation des bagages ! 

12 commentaires:

  1. This green is so rich and inspiring. I love your Japanese gardens. Your videos are awesome.
    Annie

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Sorry for this late answer ! Your reviews are still precious to me. Thank you, Annie.

      Supprimer
  2. Une journée très riche avec de magnifiques photos. Celle du lotus rose est une splendeur. Quel bonheur, ces jardins de Kyoto !
    Ton article me fait beaucoup de bien.
    Bises
    Michèle

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je partage ton avis sur ced jardins !
      Merci de ton commentaire enthousiaste.

      Supprimer
  3. Les lotus ressemblent à une forêt et le lotus est d’un rose éclatant. Je regrette les mousses mais les arbres nous offrent un camaïeu de verts très reposants.
    Myos_ji. Tout dans cette ville invite à la promenade. C’est un endroit harmonieux et paisible : temples, verdure, lumière…un accord parfait.
    Keishin_on. Je ne me lasse pas de la beauté de ces jardins au sable ratissé.
    Myoshin_ji. Ici, la promenade est un véritable catalogue de toits pointus. Comment ne pas tomber sous le charme de cette ville superbe et unique.
    Tu nous as gâtés. Une journée tellement japonaise à ne pas oublier.
    Bisous. Mam

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Les temples de Kyoto avec leurs jardins, c'est vraiment une des plus belles images du Japon ! Merci pour cet affectueux commentaire.

      Supprimer
  4. Temples magnifiques, splendides jardins. Et pourtant pas les plus connus de Kyoto.
    A inscrire à mon prochain voyage !
    Céci

    RépondreSupprimer
  5. Thanks for the superb blog and amazing guide! I’m so jealous..I’m dying to go to Japan !
    Emma

    RépondreSupprimer
  6. I'm impressed, I have to admit. Seldom do I encounter a blog that's both
    educative and entertaining, and let me tell you, you've hit the
    nail on the head. The problem is something that too few men and women are speaking intelligently about.

    Now i'm very happy that I stumbled across this in my hunt for something relating to this.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Such a great, kind and detailed feedback! I am so impressed to receive a comment like that.
      Since you did not leave your name, I can not thank you in person. And I regret it.
      So.. Thank you very much, dear Anonymous!

      Supprimer

Un grand merci de prendre le temps de laisser un commentaire. Je promets de le lire aussi vite que possible.
N'hésitez pas à signer votre message, ce sera encore mieux : je n'ai AUCUN moyen de connaître votre nom, votre e-mail, ou votre blog.
Si vous préférez que vos coordonnées n'apparaissent pas, mais que je vous réponde en privé, utilisez le formulaire de contact, accessible sur la version web du blog.