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dimanche 19 août 2018

Japon, Uji : Byodo-in, thé Gyokuro, Ujigami jinja

Un voyage à Uji


Uji, c'était sur mon programme depuis mon premier voyage. Un temple fameux, un sanctuaire réputé, la ville mythique des amateurs de thé vert (avec le village Shirakawa et le précieux Gyokuro). Mais le problème, c'est que c'est dans la zone de Kyoto et dans cette dernière, il y a tant à voir.

Toutefois je m'étais juré, à mon dernier voyage, que si je revenais un jour à Kyoto, je passerais une journée à Uji.



Projet réalisé donc.


Uji, c'est à une demi-heure de train de Kyoto, donc je commence par me rendre à la gare. Les pâtisseries françaises portent des noms inhabituels !


Le train est bondé. Ce n'est pas pour Uji, où ne descendront avec moi que des Japonais, mais pour Nara, l'ancienne capitale qui vaut bien une visite.


La petite gare locale est plutôt une réussite architecturale. Je me précipite à l'office de Tourisme afin de glaner quelques informations.

 Pour visiter le temple et le sanctuaire, pas de problème. Pour Shirakawa, c'est une autre paire de manches : pas de transport en commun. Soit je prends un taxi, soit je marche des kilomètres en suivant la route. La dame volubile et souriante me le déconseille. " C'est très très loin ! " Je ne prends pas ses déclarations pour argent comptant. J'ai remarqué que les Japonais ont horreur de marcher en bord de route. Je ne vois pas pourquoi : les accotements prévoient souvent une circulation piétonne ;  la plupart des automobilistes ne roulent pas comme des malades et font extrêmement attention aux piétons. Je ne le lui avoue pas mais ma résolution est prise.


Pour le moment  je suis ses indications très précises pour me diriger vers le Byodo-in : à quel repère il faut tourner, etc. Un modèle de guidage pour touristes.


Et, avant ma cure de thé vert, je me régale d'un espresso servi par un jeune homme sympathique qui met tout son anglais en œuvre pour me faire conversation.

Outre la ville fort plaisante, le chemin vers le temple, dans un parc, est si agréable qu'il diminue l'effet du soleil qui tape fort.



J'arrive finalement à la porte où je prends mon billet à 600 ¥, plus le supplément à 300 ¥ pour voir l'intérieur. Me voici dans la place!

Le Byodo-in 



En 1052, Fujiwara Yorimichi, conseiller de l'empereur, transforma la villa héritée de son père en temple. En 1053, le grand pavillon était terminé. Un an seulement de travaux !


Les pavillons



L'originalité fut de placer le temple directement au centre du petit lac, de sorte qu'il se reflète de tous côtés.


Le pavillon central, l'Amitabha, a gagné le nom de Pavillon du Phénix.


Non seulement sa forme évoquerait l'oiseau légendaire, mais deux sculptures dorées sont placées de part et d'autre du toit principal. Alors que la construction est d'origine, ce qui est rare, les phénix sont des copies, dont on voit les originaux dans le magnifique musée attenant.


Le temple est si célèbre qu'il est représenté sur la pièce de 10 ¥.


Le pavillon central, quel que soit son nom, est supposé représenter la demeure au Paradis d'Amida, terme japonais pour désigner le Bouddha de la Terre Pure.


C'est une des rarissimes constructions subsistant de la période d'Heian (en gros de 800 à 1200), ce qui explique les différences avec la plupart des temples. Ce qui frappe le plus est la couleur, je crois. J'écrivais hier ma préférence pour ceux qui n'étaient pas colorés, mais il demeure dans une seule teinte, un beau rouge sombre et intense de laque. L'autre divergence concerne la ligne plus effilée qui allège les masses. La comparaison avec le trapu Higashi hongan-ji d'hier saute aux yeux !


Et l' idée de l'île me séduit vraiment.


C'est vrai que lorsqu'on fait le tour, on trouve toujours une ligne gracieuse qui se reflète.




Les statues de phénix, un peu plus visibles.

Selfie du jour !

La tour de la cloche



Aucune information sur cet édicule, qui semble d'époque. Je n'ai aucune idée de sa destination, c'est tout à fait inhabituel dans les ensembles des temples.


La tour de la cloche, ça, je connais bien. L'original est protégé au musée, mais ce serait la plus ouvragée du Japon. Les détails sculptés obéissent à un code précis.


Le musée

Le musée présente de manière remarquable les originaux des sculptures, les phénix et la cloche donc, mais aussi une série de boddhisattvas sur des nuages, exceptionnelles réalisations d'une grande variété.

Les grands Bouddhas dorés me fascinent par la pureté des lignes.

Hélas, taking photo is strictly forbidden. J'en suis réduit à photographier livre, affiches, cartes postales pour donner une idée.









La seule photo de l'intérieur que j'ai trouvée. Je n'ai pu faire mieux !

Les pavillons secondaires



Derrière le musée, une série de pavillons plus ordinaires se serrent autour d'une pagode en pierre.





J'adore cette géométrie que fabriquent les toits japonais.


Je suis tenté de rester un peu plus mais mon programme est chargé !




Je descends vers la rivière Uji et ses affluents, traversée de multiples ponts vermillon.


Seicho-no-Ie

Le temple porte le nom d'une religion japonaise : seicho no ie signifie accueil des progrès infinis.


Cette croyance, strictement monothéiste, insiste sur le pouvoir de la parole positive.


Dans ce temple, aujourd'hui, grand événement : quand j'arrive sous la tente, on m'a déjà offert trois tasses  de thé aux stands tenus par des bénévoles. Et quelle foule ici !



J'ai rarement vu autant de prêtres, affairés dans tous les coins.


La statue semble être le sujet de vénération.


Je suivrais bien la cérémonie, je n'ai encore jamais assisté au culte de seicho no ie, mais j'ai toujours du chemin à faire !

Shirakawa !


Je repars donc par le petit jardin qui, comme la plupart de cette ville, possède quelques plants de théiers.


La ville du thé vert



Uji, c'est donc un des lieux du Japon les plus connus pour son thé vert. Mais on n'imagine pas combien la ville marche au goût du thé. Même certains noren (les pans de tissu à l'entrée) sont verts !
La preuve en images.



Liqueur de thé vert.













Et, si le thé d'Uji, surtout le  matcha, jouit d'une belle réputation, Shirakawa est le Romanée-Conti du thé. On y produit le gyokuro, le thé le plus précieux du Japon, peut-être du monde (certains Darjeeling et surtout le Yin-Zhen chinois sont en lice). J'en ai vu en France à plus de 500 € les 100 g. Donc, direction Shirakawa !

Vers Shirakawa




Je passe par des allées charmantes mais bientôt dois suivre la route, comme prévu.


Sur plusieurs kilomètres, je marche prudemment derrière la ligne... Verte, bien sûr. La route ombragée grimpe bien.

Shirakawa 



J'atteins un village. Pas de panneau. Le blog d'hier a épuisé mon data (problème de connexion avec la Wi-Fi), le GPS me positionne sur un plan muet. Je sonne à une porte pour demander où je me trouve. Un peu interloquée, une dame serviable me confirme que Shirakawa, c'est ici. Mais où sont les champs de théiers ? Elle me déverse un flot de japonais qui excède complètement mes compétences rachitiques, et je dois lui faire tellement pitié qu'elle m'accompagne pour être certaine que je ne me trompe pas. Des touristes étrangers, elle ne doit pas en croiser tous les jours.


Nous traversons donc le village où s'alignent des villas coquettes.




Ca y est ! Je les vois !



Mais ils n'ont pas encore le voile ?



Ah, enfin !


C'est que le Gyokuro, ce thé à petites feuilles, est traité comme un roi.


Il bénéficie du sol très riche et de l'eau extrêmement pure de la région ; ce n'est pas étonnant qu'on y produise aussi du whisky. Toutes les opérations sont menées à la main. Enfin, vingt jours avant la cueillette  on couvre les plants avec ce fameux voile, qui concentre la chlorophylle et confère aux feuilles cette teinte sombre et distinctive. Le goût est complètement transformé. Autrefois il était réservé à la famille impériale.


Impossible de visiter une manufacture de thé ici, dommage. Mais on me propose un centre de production assorti d'un musée qui accueille les visiteurs.


Retour donc vers Uji.


Ici, comme à Chiran, les théiers s'infiltrent dans la ville.


Et j'ai l'impression qu'on produit aussi du Gyukuro !

La "fabrication" du thé



Quelques reconstitutions d'intérieur où, si on prend le supplément, on peut assister à la cérémonie du thé. Même problème que précédemment.



Comment fait-on du matcha, ce thé en poudre très fine ? C'est bien simple, on le pile avec une meule en pierre volcanique.


Ukiyo-e, gravures colorées, illustrant les opérations au XIXe siècle. Les principes sont restés les mêmes,  seule la mécanisation a changé.


Je m'attendais à découvrir, dans le film projeté, des particularités au thé japonais. Une seule au bout du compte.

J'ai visité des plantations de thé un peu partout en Asie, en Inde, au Sri Lanka, en Chine, au Laos, au Cambodge.

Les différences essentielles concernent le type recherché : si on veut du thé noir, on fait fermenter les feuilles, alors que pour le thé vert, on stoppe la fermentation en les passant à la vapeur. Dans tous les cas on doit brasser les feuilles pour les flétrir, ensuite les dessécher pour qu'elles tombent à 5 % d'humidité.

La particularité japonaise est visible par tous ceux qui en ont dans les mains : les feuilles ne sont pas roulées comme c'est le cas sur le continent asiatique, mais coupées en étroites languettes, comme les Japonais le font avec les algues.

Il existe une version avec des brindilles non ôtées, l'aracha. Certains considèrent que le bois donne une saveur particulière et sont amateurs de cette version.

Quelques images donc provenant du film, et des machines exposées.














 Après tout cela, une dégustation s'impose.


Je suis chouchouté avec beaucoup de gentillesse et le couple fait tout pour que je comprenne bien les explications. Je goûte des breuvages très différents.

Le thé glacé, ici, se fait suivant une recette que je ne connaissais pas : une cuillerée à café dans un litre d'eau glacée, une heure de macération. Pas du tout d'eau chaude donc. On obtient ce beau vert, qui peut tirer sur l'émeraude, alors que celui préparé avec de l'eau chaude prendra les nuances du jaune.


Toute une série de thés différents provenant de ce coin ! Et que des thés nature, bien évidemment, pas de fruits rouges, menthe ou cannelle-orange.


Les prix restent élevés par rapport à la moyenne japonaise, mais cela n'a absolument rien à voir avec ceux pratiqués en France.

Achat obligatoire !


Je continue en direction du centre-ville. J'aimerais bien trouver un coin pour déjeuner !


Ce n'est pas là que je vais trouver.


Je me demande si ce n'est pas un système pour prévenir des séismes. Le sol a tremblé  l'autre jour, à Kyushu.


Pas de restaurant dans le coin. Mais c'est vraiment très plaisant de se promener dans ces rues paisibles.


Je pensais que la ville aurait plutôt mis à l'honneur les feuilles de thé que celles d'érable.


Un sanctuaire? Comment résister ?



Déjeuner au thé



Finalement c'est en revenant vers le Byodo-in que je trouve mon bonheur.  Je peux goûter la spécialité locale, le repas au thé. Je ne parle pas de repas où on boit du thé, c'est le cas général dans les restaurants, mais de plats cuisinés avec du thé.


Je goûte donc tempura au thé (crevette, potiron, courgettes et pour la première fois, haricots verts), soba froides au matcha (incorporé dans les pâtes), un bouillon au thé et des mochi au thé. Inutile de préciser la boisson. Ah si, j'ai aussi droit à un verre d'eau. 2180 ¥ pour tout cela.



Je reprends le programme rando. Traversée de la rivière pour débuter.



C'est une zone pavillonnaire très proprette, au milieu de laquelle je découvre avec stupéfaction une église, pas immense mais d'une élégante architecture contemporaine.




Bientôt je passe de la rue au chemin, ombragé par des érables étoilés. C'est également un plaisir de se promener ici.


Ujigami-jinja



Le Lonely ne cite même pas ce sanctuaire, pourtant classé Patrimoine de l'UNESCO !


Il fut construit à la même époque que le Byodo-in pour lui servir de temple-gardien.


Son histoire tourne autour d'un noble qui s'est fait seppuku (appelé à tort hara-kiri) car il se sentait inapte au trône et poussa ainsi son frère à prendre sa place.



Une de ses caractéristiques est de présenter des toitures de type différent : chaume, écailles de bois, mousse.




Par ailleurs la fontaine est une source. On puise l'eau à même le sol.






Je rentre vers la gare en retraversant la rivière.







Dans la rue principale, de la glace au gyokuro. Waouh ! Mais 500 ¥, c'est plus coûteux que d'habitude !


Retour tranquille vers Kyoto dans un train bien moins rempli que ce matin. Je tente de saisir le blog à la gare, mais j'abandonne rapidement. Pas de siège dans la zone où je capte correctement la Wi-Fi, je ne me vois pas passer quatre heures debout après une bonne journée de marche.

Je file à Yodobashi pour racheter une carte Sim, 1 Go encore. Ça m'apprendra. La prochaine fois, j'en achète une de plus grosse capacité ! 

16 commentaires:

  1. A great day full of discoveries You should write a book, Adventures of a gourmet!
    Still beautiful pictures. Do you shoot them with your cellphone?
    Annie

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    1. I laughed with your message! Yes, I am forced to use only my cellphone as I am unable to transfer pictures from my camera.
      Thanks Annie!

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  2. Je ne connaissais rien de ces choses qui te semblent célèbres. Ni la ville, ni le temple, ni les différents thés, rien.
    Mais j'ai l'impression, avec ton article très vivant, d'être devenue beaucoup plus savante !
    Merci.
    Bises
    Michèle

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    1. Tu n'es sans doute pas la seule à n'avoir jamais entendu parler de Uji, rassure-toi !
      Merci à toi pour ce chaleureux commentaire.
      Bisous

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  3. I never heard about Uji but your report on this tea town is really great. Amazing temple and wonderful tea fields!
    Jo from Baton Rouge (french ancestors in my family!)

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    1. Many thanks, Jo, for your nice review. Welcome to all readers from Louisiana!

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  4. I am drooling, DROOLING over this post !!!!
    Melinda

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  5. Les temples sont si beaux que l’on dirait des décors, avec leurs toitures extraordinaires… de véritables joyaux.
    Je suis aussi séduite par les champs de thé vert dont je suis très amateur. Une ville entièrement consacrée au thé : voilà qui est peu commun.
    Comme tous les jours, des découvertes, textes, photos. C’est un grand plaisir de parcourir ce blog très documenté.
    Bisous. Mam.

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    1. Merci beaucoup pour ce commentaire développé ! Cette ville du thé est vrai incontournable pour les amateurs.
      Gros bisous !

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  6. Thanks to your blog, Japan is on the number one position in the my travel bucket list now. And the best part, I am planning a trip to this amazing place in coming April.
    Sharmay

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    1. Thanks Sharmay, for your nice comment. I wish you a wonderful trip during Hanami!

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  7. 旅行のこの日はエキサイティングです。

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  8. Outstanding post ! Amazing pics, awesome texts.
    A great blog, better than everything else. A pure gem!
    Sean

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    1. I am very proud to read such a feedback, Sean. Thank you very much!

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