Difficile de donner un nom à cette promenade bien remplie ! J'avais envisagé de la nommer "Dans la Pigna", le nom du rione (quartier), mais ça n'aurait rien dit à personne. Je me suis borné à reprendre le monument le plus célèbre visité dans la journée.
Ce matin, le soleil brille toujours insolemment ; c'est parfait pour mon programme dans le centre, et les rues au tracé médiéval devraient m'offrir un peu d'ombre.
Premier arrêt pour la Basilique San Vitale, toujours aussi peu visitée malgré l'originalité de son décor et son emplacement central, Via Nazionale.
Je traverse la via del Corso ; me voici dans un quartier de palais dont quelques-uns remontent au XVe siècle.
Le pied de marbre appartenait à une statue colossale de huit mètres de haut, qui, si je me rappelle bien, représentait la déesse égyptienne Isis. Mini-attraction de la rue.
Rome a ses magasins de vêtements, innombrables. Pour toutes les occasions !
Je comptais bien revenir à Santa Maria sopra Minerva, église à la façade peu réjouissante mais à l'intérieur riche et intéressant. Pas de chance, elle est en travaux.
L'éléphant porte-obélisque est un collage surréaliste dû au Bernin. L'obélisque provient d'un temple dans le delta du Nil et on le rapporta d’Égypte pour décorer le nouveau temple d'Isis à Rome, commandé par Caligula et reconstruit par Domitien après le grand incendie.
Le montage du Bernin, dont il existe la terre cuite préparatoire, inspira d'ailleurs Salvador Dali.
Je tourne à droite, Via dei Cestari, et j'atteins déjà le Panthéon. Impossible de revenir à Rome sans revoir ce chef-d’œuvre essentiel, que je tiens toujours pour le plus impressionnant monument de l'Antiquité romaine. Malheureusement, même si le nombre de visiteurs est vraiment très modéré, la file d'attente avance très lentement. Le Covid a imposé une quantité limitée de visiteurs à l'intérieur, et on vérifie la température de chacun avant d'entrer. Résultat, quarante-cinq minutes à patienter au soleil.
Tout le quartier autour du Panthéon est extrêmement populaire, et à juste titre. Rues de carte postale, façades ocrées, nombre infini de lieux à visiter, tout semble s'additionner pour le plaisir du touriste.
Et même les tentations ! Je ne cède pas, je cherche plutôt à déjeuner.
Déjeuner
Je trouve mon bonheur près de la Piazza San Nicosia ; spaghetti bio au pesto d'ortie, filet de poulet pané à la japonaise, gâteau sicilien au chocolat et à l'orange. Une bière légère et un espresso pour faire passer tout cela. 23 € tout de même.
La vaisselle est en fibres recyclées !
Je retente ma liste d'églises à visiter, mais j'en trouve davantage de fermées que d'ouvertes.
Je file Piazza Navona, avec ses fontaines et son église Sant'Agnese in agone. Sa crypte est fermée mais cette fois, l'église est ouverte !
Je ne m'attendais pas du tout à la fermeture de Santa Maria della Pace ; outre sa façade vraiment insolite de Pietro da Cortona, elle abrite des fresques de Raphaël et un délicieux cloître de Bramante. Je crois que ma dernière visite, c'était en 2005. Tant pis, elle restera close tout au long de mon séjour.
Ici et là, on voit du réemploi de constructions antiques...
Cette végétation qui déborde dans les rues reste pour moi indissociable du paysage romain.
La façade de l'Hôtel Raphaël est peut-être la plus extraordinaire de tout Rome ! Je crois qu'elle est assez récente et fut imaginée par un jardinier paysagiste.
Je tente une visite à San Carlo ai Catenari. Elle n'ouvre qu'à seize heures et j'y repasserai plus tard. En fait, je vais même y repasser plusieurs fois durant mon séjour, à ses supposés horaires d'ouverture, jusqu'à me renseigner chez l'amène pharmacien d'en face. Elle est en travaux depuis des mois, m'assure l'apothicaire, et est bien loin de rouvrir.
On peut toujours compter sur les jardins suspendus !
Le Largo Argentina
L'aire sacrée qui fut fouillée dans les années 1920 comprenait une série de temples parmi les plus anciens retrouvés à Rome.
Les archéologues identifièrent plusieurs niveaux de construction, à partir du Ve siècle avant Jésus-Christ. Le temple circulaire, du IIe siècle avant J.C., était sans doute consacré à Junon, dont une statue y fut retrouvée.
Même si les vestiges sont modestes, les escaliers et les colonnes permettent d'imaginer facilement le temple qui se trouvait là, de la même époque que son voisin.
Autrefois les chats de Rome étaient une célébrité locale, diffusée sur les tee-shirts pour touristes, et le Largo Argentina semblait leur point de rendez-vous. Les autorités ont dû leur donner la chasse, je n'en croiserai aucun lors de mon séjour !
Par le Corso del Rinascimento, je retourne à proximité de la Piazza Navona afin de revoir Saint Louis des Français...
et évidemment profiter, encore une fois, des fabuleux Caravage de la chapelle Contarelli.
Retour sur la Piazza Navona pour l'incontournable Tartufo Nero des Tre Scalini. Plus cher qu'ailleurs mais incomparable ! La glace au chocolat ultra-noir est entourée d'une couche croquante avec des feuilles de chocolat, et la crème fouettée qui l'accompagne est presque sans sucre. C'est absolument unique. De mémoire, 11 € avec l'eau gazeuse. La vue sur la Piazza Navona est offerte.
Piazza di Pietra, à l'arrière d'un bâtiment administratif ordinaire, une rangée de colonnes réussit à restituer le Temple d'Hadrien.
La place de Sant'Ignazio est très réputée pour son effet de petit théâtre, comme un décor avec des coulisses. C'est un de ces nombreux endroits romains qui ont beaucoup de charme !
Et évidemment, j'en profite pour revoir les trompe-l’œil absolument hallucinants d'Andrea del Pozzo dans l'église Sant'Ignazio.
L'aigle romaine et même l'acronyme SPQR n'ont pas disparu à Rome ! Cet ancien bâtiment de l'Union Militaire est devenu, ô surprise... un magasin de vêtements.
Impossible de visiter San Lorenzo in Lucina, la prochaine étape de mon itinéraire. Mais la suivante est ouverte !
La basilique des Saints Ambroise et Charles (basilica dei SS. Ambrogio e Carlo al Corso)
Tous les touristes qui arpentent la Via del Corso pour faire leur shopping ont forcément remarqué cette basilique, la plus vaste de la rue. Son dôme se voit de loin et, depuis le Quirinale ou la Trinità dei Monti, beaucoup la photographient en le prenant pour celui de Saint Pierre ! C'est le quatrième plus grand de la ville de Rome, et c'est Pietro da Cortona qui le conçut.
Nef avec le plafond de Giacinto Brandi, La Chute des Anges Rebelles |
Construite vers 1612, elle est dédiée à deux saints milanais, le père de l'église Saint Ambroise et Saint Charles Borromée, et donc a longtemps été le point de ralliement de la communauté lombarde.
La décoration intérieure fut achevée à la fin du XVIIe siècle, et ce baroque tardif a donné une certaine théâtralité. Le choix de ce marbre rayé est vraiment rare.
Carlo Maratta et Giacinto Brandi dessinèrent le maître-autel, conçu comme une chapelle simplement par le choix des marbres. Le premier artiste a également peint le retable de La Gloire des Saint Charles et Amboise.
C'est difficile de s'en approcher mais, de loin, je ne retrouve guère la patte de Maratta.
Dans celle-ci, il me semble la voir davantage, pourtant ce n'est qu'une copie en mosaïque de sa Vierge en gloire avec des saints. L'original se trouve à quelques centaines de mètres, dans la chapelle Cybo de Santa Maria del Popolo.
Le reliquaire du cœur de Saint Charles est bien protégé. Le trafic de reliques serait-il aussi lucratif qu'au Moyen-Age ? Ou craint-on que ces vils mécréants ne récupèrent simplement l'or de la monture ?
Giacomo Zoboli, La Communion de Saint Stanislas Kotska |
C'est dans cette église que Franz Liszt avait prévu de se marier avec sa chère princesse Carolyne de Sayn-Wittgenstein. La séparation d'avec son mari lui avait progressivement fermé toutes les portes de la noblesse européenne, et on lui avait même retiré ses biens. Elle vivait "suspendue aux doigts de Liszt" écrivit-elle.
Tous deux vinrent à Rome pour plaider leur cause auprès du pape, tout d'abord favorable au divorce de madame. Mais, suite à des pressions de notables ou de nobles, il le leur interdit finalement. C'est à la suite de cet événement malheureux qu'ils se séparèrent et que Liszt décida de devenir prêtre.
Il faut lire une biographie de Liszt, c'est une vie incroyable et passionnante ! Avez-vous entendu parler d'Olga Janina, fausse comtesse cosaque, qui tenta de le tuer deux fois, la première à la Villa d'Este, au revolver, la seconde, en l'empoisonnant ? Bon, je ferme ma parenthèse, je m'égare.
A la sortie du transept de la basilique, on découvre un énorme monument, si volumineux que je me demande toujours pourquoi si peu de touristes le connaissent.
Tout proche de l'Ara Pacis, l'autel de la Paix, ce mausolée pour Auguste et les siens ressemble aujourd'hui à un tumulus anonyme. Des siècles de prélèvement lui ont ôté ses marbres et ses statues, et le matériau fut abondamment réutilisé aux alentours.
Il semble qu'aujourd'hui, on ait réussi à réunir les fonds pour reprendre les fouilles et le restaurer.
Je suppose qu'il est hors de question de lui redonner son aspect antique puisque ce n'est plus ainsi que l'archéologie est pratiquée de nos jours, mais j'espère qu'on lui ôtera l'aspect de terrain vague qu'il avait à mon précédent passage (il y a dix ans !).
Je descends la Via del Corso, pour une dernière église ; je ne suis pas certain qu'elle soit ouverte... La chance me sourit.
Santa Maria in via lata
La façade de Pietro da Cortona |
Encore une basilique des plus anciennes, dont le titre date du IIIe siècle. Il reste d'ailleurs des traces de la toute première construction dans la crypte, fermée comme beaucoup d'autres. L'église actuelle fut construite aux VIIIe et IXe siècle, rénovée à plusieurs reprises et, encore une fois, au XVIIe siècle. La façade fut construite de 1658 à 1662 par l'incontournable star romaine Pietro da Cortona.
Les étapes se lisent assez clairement ; le plan basilical avec les colonnes fut conservé au cours des modifications.
C'est la décoration baroque qui fut l'étape la plus importante pour la transformation de l'aspect. Quelle idée curieuse de dorer les chapiteaux ioniques ! Les colonnes, plutôt rares, sont en jaspe sicilien.
Viviano Codazzi, Architecture en trompe-l’œil |
Sans pouvoir concurrencer les fresques de Sant'Ignazio, ce trompe-l’œil n'est pas si mal. Il faudrait qu'on nous laisse nous avancer davantage pour nous trouver sur le point de vue prévu ! Cette perspective est l’œuvre de Viviano Codazzi, spécialiste au XVIIe siècle de cette illusion qu'on nommait la quadratura.
Pour le chœur, Le Bernin utilisa vingt marbres différents ainsi que du bronze doré ; au centre, il est difficile de bien voir à distance la Madonna Advocata, une icône du XIe siècle autrefois réputée pour avoir été peinte par Saint Luc.
Au-dessus, Andrea Camassei a peint une Assomption de la Vierge avec de gros nuages, restaurée au XIXe siècle.
Giacinto Brandi a largement œuvré Via del Corso. Ici il a peint ce Martyre de Saint André, pas bien commode à photographier entre les reflets et le contre-jour.
Au fond, on aperçoit un Baptême du Christ d'Agostino Masucci, un élève de Carlo Maratta, et à droite une partie de l'orgue de 1652.
Je tente la Galleria Doria-Pamphilj, pleine de tableaux célèbres (et plusieurs Caravage, hein). Fermée mais je devrais normalement la voir. Il faut téléphoner pour obtenir une visite du vendredi au dimanche. En fait, je vais tenter à plusieurs reprises sans obtenir de réponse, hélas.
Via le Teatro Marcello, je rejoins le Forum Boarium et ses ravissants temples.
Ce soir, Die lustige Witwe m'attend au Cirque Maxime !
A magnificent tour in ancient Rome and two outstanding churches. With the #1 guide!
RépondreSupprimerWe are very lucky!
Annie