Translate

samedi 29 décembre 2018

Prague : Rusalka, Narodni Divadlo

Production intelligente de Rusalka de Dvorak au Narodni Divadlo, l'Opéra National de Prague ; une belle représentation avec Dana Burešová et Aleš Briscein.


Après Un Ballo in Maschera hier, me voici de retour dans cette belle salle dorée du Narodni Divadlo.
Ce soir, c'est un classique du répertoire tchèque, Rusalka de Dvorak. J'ai déjà chroniqué ici plusieurs représentations (Saint Petersbourg, Prague, mais au Karlin) de ce magnifique opéra qui conte les malheurs d'une ondine amoureuse d'un prince, où on retrouve l'histoire de la petite sirène.

Nouvelle production de Jiří Heřman



Exit la production poussiéreuse de Zdenek Troska. La nouvelle de Jiří Heřman est toute différente.


Un décor abstrait constitué de tentures, généreusement embrumé par une diffusion continue de poudre (je crois que c'est le talc qu'on utilise pour créer la fumée au théâtre), est personnalisé par d'habiles éclairages pour évoquer tantôt l'univers aquatique, tantôt le monde terrestre.

Le ballet est mis à contribution dans une chorégraphie contemporaine, aussi bien dans la scène obligée des danses de cour à l'acte II que tout au long des I et III, en créant des images fortes, comme ces sœurs de Rusalka qui se heurtent aux parois et dont seul le corps en contact avec le tissu apparaît par transparence, comme des tableaux d'Yves Klein.

Un parti pris très original :  faire interpréter la sorcière Jezibaba et la Princesse Etrangère, autrement dit la magicienne qui transforme Rusalka et celle qui lui enlève son bien-aimé, par la même personne. Une conception intelligente qui se heurte malheureusement à l'exigence de la partition, j'y reviendrai.

Et une excellente direction d'acteurs, très soignée dans le détail, avec une foule de bonnes idées. Par exemple, Rusalka, démunie de sa voix, perdue dans le château du prince, s'empare du manteau de sa rivale croyant adopter ainsi le costume obligé. Mais elle apparaît ainsi comme une pauvresse, et elle est rejetée par les courtisans qui arborent de brillantes tenues (la photo ci-dessus).

Une des meilleures productions vues ici !

Au début, le ballet avec les nymphes

Vodnik et sa fille Rusalka

Rusalka et le Prince

La Princesse Etrangère humiliant le Prince.

Les nymphes au troisième acte

La distribution du soir


Le marmiton de Kateřina Jalovcová, bonne actrice et chanteuse efficace, forme un duo plaisant avec le vétéran Ivan Kusnjer, dont la projection commence à diminuer un peu, me semble-t-il.


Michaela Zajmi, Václava Krejčí Housková
Les trois chanteuses retenues pour les nymphes des bois (Lucie Silkenová, Michaela Zajmi, Václava Krejčí Housková) ont des voix typées, bien différenciées, et leur trio enjoué fonctionne à merveille. Elles bénéficient de pages ravissantes et en tirent toute la musicalité qu'elles contiennent.

František Zahradníček
František Zahradníček n'est pas doté d'une voix très large ni très sombre, et elle vibre (étonnamment) assez peu ; mais elle demeure sonore et bien projetée, et sa composition d'un père castrateur fonctionne bien. Il sait exploiter sa stature pour conférer hiératisme au personnage.

Aleš Briscein
Le Prince est un rôle qui va comme un gant à l'élégant Aleš Briscein, qui y est aussi à l'aise que dans son bel Eisenstein de l'an dernier. Sa voix claire et l'habile négociation des périlleux aigus sont autant d'atouts pour le rôle. Style impeccable, grande qualité d'un jeu dramatique nuancé, on ne sait que louer dans cette belle incarnation.

D'autant plus qu'il assure un remplacement (de super-luxe), c'était Peter Berger qui était précédemment affiché. Un grand bravo !


Ales Briscein, Veronika Hajnová, František Zahradníček

Je l'écrivais plus haut, autant je trouve que la fusion de Jezibaba et de la Princesse Etrangère en un seul personnage est dramatiquement intéressante, autant c'est un vrai piège musical. Les deux rôles réclament deux voix différentes, surtout que la chanteuse est contrainte d'alterner la sorcière avec ses graves caverneux, la princesse avec une ligne beaucoup plus aiguë, pour revenir à Jezibaba au troisième acte.

La chanteuse qui s'expose à pareil tour de force est contrainte de faire des choix, alléger ses graves du premier acte si elle veut supporter l'écriture du second. Et c'est bien dommage car on sent bien qu'on perd là les atouts majeurs de Veronika Hajnová, de toute évidence bien plus mezzo que soprano. Une chanteuse à réentendre dans un contexte plus favorable, en tout cas !

Dana Burešová
Dana Burešová, une des célébrités de la troupe, n'en est pas à sa première Rusalka et on sent bien à sa manière de gérer le rôle combien elle est habituée à en déjouer les pièges. Elle ne triche pas avec une partition bien exigeante, et nous gratifie d'une authenticité stylistique admirable. Comme elle est également engagée dans son jeu dramatique, on est bien servi.

Zbyněk Müller
Zbyněk Müller, encore un de ces chefs tchèques bien méconnus chez nous, dirige avec extrêmement de vie son orchestre, veillant à ne pas le laisser déborder (c'est que l'écriture de Dvorak sait être parfois opulente) et en gardant un œil sur tout, donnant tous les départs, respirant avec les chanteurs. Le succès de la soirée repose en large partie sur ses épaules, évidemment.

Briscein, fils et père

avec Aleš Briscein

Václava Krejčí Housková

Zbyněk Müller

Lucie Silkenová

Michaela Zajmi

avec Dana Burešová

Veronika Hajnová


6 commentaires:

  1. If this is the case then results could be skewed or writer may be struggling to draw
    any sensible conclusions. Each format pressupposes some formation plus
    design for citing rephrased and echoed resources in support of all various printed, internet, and other kinds of
    resources. To ensure that these people will understand the message that you are
    hoping to get across, write employing their language
    and write while considering their degree of comprehension.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Are you sure this comment is really appropriate to my post ?

      Supprimer
  2. A great performance, indeed !
    The ballet seems brilliant on your pics (and you are handsome with your favourite singers).
    Great post, thanks !
    Annie

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Thank you very much for all your warm thoughts and your kindest words, dear Annie !

      Supprimer
  3. Je ne connais pas du tout cette œuvre mais j'aurais bien aimé être là ! Votre article enthousiaste et fouillé suscite des envies.
    Vous étiez superbement placé dans la salle !
    Merci, encore une fois.
    Pierre

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est une œuvre magnifique. L'Opéra Bastille le programme bientôt dans l'excellente production de Carsen, n'hésitez pas !

      Supprimer

Un grand merci de prendre le temps de laisser un commentaire. Je promets de le lire aussi vite que possible.
N'hésitez pas à signer votre message, ce sera encore mieux : je n'ai AUCUN moyen de connaître votre nom, votre e-mail, ou votre blog.
Si vous préférez que vos coordonnées n'apparaissent pas, mais que je vous réponde en privé, utilisez le formulaire de contact, accessible sur la version web du blog.