Washington : Peintres européens à la National Gallery (aile est)

Après les peintres américains et ceux français, je complète mes articles sur l'aile est avec quelques œuvres d'artistes venant d'autres pays d'Europe, majoritairement germaniques mais aussi  des Russes, un Roumain… Toujours un classement difficile pour les voyageurs qui émigrent à Paris ou aux Etats-Unis. Que faire de Moholy-Nagy, naturalisé américain, ou de Kupka, mort à Puteaux ? Ce n'est pas publier un manifeste que de les placer ici, c'est simplement une commodité de publication.

Expressionnistes allemands

  

Emil Nolde, Blumengarten, Frau mit Hut

Dans ce jardin de fleurs (Blumengarten) luxuriant, on ne voit pas immédiatement la femme au chapeau (Frau mit Hut), une jardinière en haut à gauche. L'artiste expressionniste fut d'abord influencé par l'impressionnisme, Van Gogh et Gauguin qui lui donnèrent peut-être le goût de la thématique des jardins, un pan important de son œuvre. C'est un des peintres particulièrement honnis par le régime nazi qui confisqua plus de mille tableaux et en détruisit une certaine quantité.

August Macke, Gens au bord de la Mer Rouge

J'aime beaucoup cet autre expressionniste, avec sa palette vibrante, si rarement visible chez nous. Il fit partie du groupe du Blaue Reiter, le Cavalier Bleu, dont Franz Marc et Wassili Kandinsky étaient membres. C'est un des artistes fauchés par la guerre, mort sur le champ de bataille dans la Marne, à l'âge de vingt-sept ans. J'ai vu sa tombe à Souain quand je vivais en Champagne.

Max Pechstein, Jour d'été

 Avec Pechstein, c'est un autre groupe de peintres qui est évoqué, Die Brücke (Le Pont), des amis de Dresde parmi lesquels Kirchner et Schmidt-Rottluff, mais aussi brièvement Nolde et van Dongen. Beaucoup de portraits chez lui, mais aussi des scènes vivement colorées où la palette travaille souvent les couleurs complémentaires. Un autre artiste qualifié de dégénéré par le IIIe Reich.

Max Beckmann, Scène de bain

Max Beckmann s'installa aux Etats-Unis, mais après la guerre qu'il vécut difficilement, réfugié à Amsterdam dans des conditions pénibles. Dans son œuvre très multiple, je connais surtout des forêts inquiétantes, des portraits parfois déformés, des acrobates. Les visages sont souvent masqués, métamorphosés, et c'est ce qui me paraît caractéristique ici.

Paul Klee 

Paul Klee, Barocker Kentaur

Un de mes peintres favoris du XXe siècle ! Quelqu'un qui me séduit par son infinité de recherches créatrices, son inspiration sans cesse renouvelée, l'inventivité de ses titres, et malgré tout la rigueur imposée de ses travaux souvent collés sur le même carton, avec le titre, l'année, la signature portée à l'encre. L'exposition de 2016 au Centre Pompidou m'avait enchanté.
Ici, avec ce Centaure baroque, c'est la tendance couleur vive sur fond noir qui s'impose.

Paul Klee, Junger Wald / Grüne Pflanzen Blutlaus

 Dans la Jeune Forêt du haut, il montre son intérêt pour un graphisme proche de l'écriture (il avait été captivé par les signes antiques) alors que Plantes Vertes Puceron du bas me semble davantage une faribole surréaliste avec un animal imaginaire qui semble sucer le sang depuis sa trompe.

Paul Klee, Dampfer und Segelbote

 Bateau à vapeur et voilier, une vive gouache pointillisme qui me séduit énormément.

Paul Klee, Rechts unfreundlich / Rote Säulen vorbeiziehend

Droit inamical, c'est le titre du tableau du haut, comme un souvenir d'écriture primitive. Passer des colonnes rouges, une sorte de carte au trésor qui semble abstraite mais où on identifie un arbre, une maisonnette...

Paul Klee, Seiltänzer

 Encore un autre style avec ce Funambule dont le graphisme fut souvent abordé par le peintre suisse.

Paul Klee, Garten der Leidenschaft / Komposition mit Figuren

Le Jardin de la Passion est un remplissage monochrome qui me paraît annoncer Pollock, opposé aux teintes vibrantes de la composition semi-abstraite du bas.

Paul Klee, Feuer clown I

Et un dernier tableau, Clown de feu I, encore dans une autre direction artistique. La collection présentée n'est pas énorme mais elle a le mérite de bien montrer la diversité de ce peintre toujours inattendu.

Voyage en Europe 

Gerhard Richter, Abstraktes Bild nr 780-1

Comme je l'avais déjà rappelé, c'est à l'Albertina que j'ai vraiment découvert Richter lors d'une somptueuse rétrospective, et j'ai montré lors de mon dernier passage dans le musée viennois un tableau pas si éloigné avec une palette jaune et verte.

Mimmo Rotella, Muro romano

 Voici un Italien, un plasticien milanais (mais qui vécut à Paris et enseigna aux Etats-Unis) très créatif. Entre réalisme et abstraction, ce Mur romain date de 1958, quand ses toiles aux "affiches arrachées" le rendirent célèbre.

Ensemble de sculptures de Constantin Brancusi

 Brancusi, encore un artiste immigré mort à Paris. Sa sculpture est fameuse pour la pureté des lignes.

Piet Mondrian, Tableau n°4

Piet Mondrian, le pionnier de l'art abstrait. En 1924, il collabore activement à la revue De Stijl et explore fiévreusement les possibilités offertes par des carrés et rectangles colorés, comme un dallage.

Laszlo Moholy-Nagy, Z VII

Le Hongrois Laszlo Moholy-Nagy immigra aux Etats-Unis après une longue errance européenne. Enseignant au Bauhaus, ce formidable centre de création berlinois, il fut envoyé par son fondateur Gropius pour diriger un nouveau centre à Chicago.

Ensemble d'œuvres de Joseph Beuys

 Joseph Beuys, c'est un artiste que je trouve souvent insaisissable, aux œuvres inattendues, parfois qui me semblent proches du dadaïsme, parfois qui inaugurent de nouvelles productions (les happenings, les performances). Son engagement politique, sa vision de la sculpture sociale, sa rencontre avec le Dalaï-Lama, amènent à regarder ses travaux d'un œil neuf.

Joseph Beuys, La rivoluzione siamo noi

C'est bien un autoportrait, dont le titre (Nous sommes la révolution) porte l'engagement sans ambiguïté.

František Kupka, Umístění grafických vzorů

Kupka, artiste souvent fascinant, un autre des pionniers de l'art abstrait. Sa palette très intensément colorée, un de ses principaux sujets de recherche, rend beaucoup de ses toiles très séduisantes à mes yeux. J'ignore si les Français savent qu'il vécut une grande partie de sa vie en région parisienne.

Gustav Klimt, Das Baby (die Wiege)

Un Klimt bien identifiable, avec ce grand format carré et ce mélange de réalisme (le beau visage du bébé) et d'innovation décorative avec cette utilisation du patchwork. Comme si Desigual avait bien regardé ses tableaux !

Après l'exposition du Leopold à Vienne, je découvre ce tableau avec beaucoup de plaisir.

Wassily Kandinsky, Improvisation 31

Un des titans russes de la peinture, représenté ici par une toile dynamique à la polychromie exubérante.

Cette fois, c'est la visite de la Nouvelle Galerie Tretyakov de Moscou qui me revient en mémoire.

Alexei von Jawlensky, Murnau

 Jawlensky est beaucoup moins connu, pourtant un artiste très intéressant qui vécut en France, en Allemagne. Proche des expressionnistes allemands, il passait ses étés à Murnau en Bavière en compagnie de peintres qui allaient créer le groupe Die Blaue Reiter.

Katharina Fritsch, Hahn

 Je croyais à un Yves Klein, vu la couleur. En cherchant un peu, j'ai découvert que ce coq géant (ou un de ses frères jumeaux) avait été exposé un peu partout. A priori, Katharina Fitsch, dont j'ignorais jusqu'au nom, semble une artiste singulière, et j'aimerais bien voir d'autres œuvres qu'elle a crées. Son Rattenkönig, par exemple.

Chaïm Soutine, Portrait de garçon

 Soutine, c'est l'école de Paris, avec Modigliani et son compatriote Chagall, mais il refusa toute sa vie d'être associé au moindre groupe, à une quelconque école, et ses œuvres souvent tourmentées seraient plus proches de l'expressionnisme.

Il  est temps de passer à l'aile ouest ! Un passage souterrain permet de se rendre de l'une à l'autre. Une expérience étonnante dans un tunnel ponctué d'éclairs lumineux.