Hier soir, je suis rentré trop tard et j'ai dépassé l'heure limite pour faire ma lessive. C'est une priorité de ce matin. Pendant qu'elle tourne, j'écris quelques cartes postales puis renseigne un couple de jeunes Français. Finalement, nous conversons une heure et demie.
Donc il n'est pas tôt quand je mets le nez dehors. Ciel chargé, il semblerait qu'il va pleuvoir malgré la chaleur toujours infernale.
Un premier temple à découvrir
Mon programme devrait me maintenir dans le quartier du Kiyomizu-Dera, et, en y montant, je remarque un temple au sanglier qui m'était passé inaperçu. Il faut dire qu'il y a plus de 2000 temples et sanctuaires à Kyoto, on finit par en perdre le compte.La sculpture de la fontaine aux ablutions me fait immanquablement penser au sanglier des Romains, avec cette crinière en arête.
Dans les rues
Je poursuis mon itinéraire. J'arrive à la grande pagode qui me sert de repère. A partir de là, la foule se densifie. Il faut avouer que ce quartier est l'un des plus touristiques de la ville, je crois aussi que c'est là qu'on trouve la plus grande concentration de boutiques de souvenirs (les pâtisseries les unes à côté des autres) et également là qu'on voit le plus grand nombre de kimonos.En général, ces vœux sont écrits sur des plaquettes de bois. Mais j'aime beaucoup ces nœuds de tissu colorés !
J'ai des courses à faire.
L'an dernier, j'ai acheté un savon dans cette boutique-ci, tout à fait extraordinaire. On dirait un mochi ; il a une consistance gélatineuse, produit une mousse abondante, et on a une sensation tout à fait différente. Celui au yuzu bénéficie du délicat parfum de cet agrume !
Certes, ce n'est pas donné (une douzaine d'euros le savon), mais c'est une idée d'un cadeau vraiment original et introuvable chez nous. La boutique se trouve dans la ruelle à gauche en descendant du temple.
Diable ! En kimono et maquillées : des maikos ou geikos (des geishas) ! Deux fois en deux jours ! Mais je suis sceptique envers celles-ci. Ne seraient-elles pas des touristes déguisées ?
Institut de beauté ? Mais non. Pâtisserie à Kyoto.
Un aparté. Les Japonais se doivent de ramener plein de souvenirs de voyage à tout le monde (si j'ai bien compris, même aux collègues de travail). Et, ici, le paquet compte autant que le contenu. Raison pour laquelle les paquets sont si soignés, et on vous donne une foule de sacs pour pouvoir les offrir séparément. Donc, dans les pâtisseries, ce qu'on trouve, ce sont des paquets tout prêts avec de la pâtisserie sous vide. Il paraît que les gâteaux, et particulièrement toutes les variétés à base de pâte de haricots de soja, sont le cadeau le plus offert au Japon.
Kiyomizu-dera
Je n'avais pas spécialement prévu de revenir au Kiyomizu-dera, mais je ne suis qu'à quelques dizaines de mètres. Allez, je m'y rends…
Le Nio-mon, la grande porte, rutile toujours. Le pavillon sur pilotis, à droite (un de spots de la ville) semble en restauration. Mais peut-être la salle aux piliers est-elle maintenant visitable... Allez, je prends mon billet.
Je passe le blabla sur la création du temple, et patati et patata, il y a tout ça sur mon article de l'an dernier.
Disons-le tout net ; cette année, c'est franchement décevant. J'avais trouvé ce temple original, avec sa terrasse suspendue et maintenue par ces énormes pilotis de bambou, mais l'absence de vrai jardin (une mare, quelques arbres, on est loin du compte) me semble très préjudiciable. Alors, avec le bâtiment drapé dans la protection noire…
Je repasse dans le couloir initiatique, toujours no photo, toujours à température de rôtisserie. De plus, quelle foule ! On n'avance pas.
Le petit sanctuaire de l'amour a toujours autant de succès, avec la pierre magique empaquetée.
L'allée de vente des amulettes est toujours bourrée.
Zut. Ici les travaux ne sont pas terminés !
L'atout majeur de ce temple, à mon avis, c'est qu'il offre une des meilleures vues sur la ville, où on peut identifier des sites connus. L'aiguille de la Kyoto Tower, juste en face de la gare, est bien repérable.
L'an dernier, j'avais pris beaucoup de plaisir à partir dans les bois, à l'arrière de la pagode. Je fais cette fois une boucle plus limitée (trente-cinq minutes de marche seulement), et arrive à un petit cimetière dans une clairière.
Retour vers la terrasse de la petite pagode, qui offre la meilleure vue sur le temple. A ne pas manquer dans la visite !
Quant à la petite pagode, elle est du même vermillon que le reste des constructions. Eclatante !
Je prends sagement ma place dans la queue de la fontaine. Me voici derrière un autochtone qui arbore un magnifique yukata.
On doit puiser, avec ces louches à long manche, de l'eau qui s'écoule. La boire et s'en verser sur les mains garantit santé et longue vie. On ne va pas s'en priver !
Je jette un regard à la mare verdâtre, que les tortues semblent avoir désertée.
Voilà, la visite est finie !
Dans les rues, suite
Un petit tour dans les boutiques. De belles céramiques en vitrine. Hum... Pas donné tout de même.
Luxueuses boutiques, créations raffinées. Prix.. hum, hum, hum.
Si on cherche une tasse à saké... c'est le bon endroit.
Les vitrines montrent des présentations colorées.
Quand je prétendais qu'ici on voyait des kimonos partout... Cette fois, on me croit ?
Toujours de belles réalisations à des tarifs déprimants.
Retour à la grande pagode. L'an dernier, j'y avais essuyé un phénoménal orage tropical. Aujourd'hui, ça n'a pas l'air de se décider.
Ryozen Gokokou
Le Ryozen Gokokou est un monument aux victimes de la seconde guerre mondiale, surmonté par ce grand Bouddha. On le voit correctement depuis l'entrée... Je me dispense de visiter la cour à 300 yens.
A la place, je me dirige vers le Kodai-ji, déjà un projet de l'an dernier. Ce temple aux érables et aux bambous jouit d'une belle réputation. Et, malgré sa proximité immédiate avec le Kiyomizu-dera, il est complètement négligé par les touristes.
Je prends un billet combiné à 900 yens, pour visiter aussi l'Entoku-in.
Kodai-ji
Le Kodai-ji est un temple zen, fondé en 1606. C'est une certaine Néné qui le fit établir pour devenir bonzesse et prier à la mémoire de son défunt mari, Totoyomi Hideyoshi (elle ne pouvait pas aller dans un temple du quartier ? Avec le choix qu'il y avait déjà à l'époque ?). Une vingtaine d'années après, le grand prêtre Sanko Osho, du Kennin-ji (si si, le temple visité le premier jour, avec les dragons au plafond) y fut accueilli, sans doute avec de beaux, ou sonnants, arguments à la clef, et le temple devint célèbre. Peu de temps après, notre vieille connaissance Tokugawa Ieyasu fit un don substantiel et on donna au temple la forme actuelle.
Malgré les histoires d'incendie habituelles, tous les bâtiments principaux sont d'époque. Déjà une rareté !
Même après toute une série de temples, celui-ci est vraiment une bonne surprise. Les bâtiments ne manquent pas de classe, on a toute la gamme des jardins, des érables et une mini-bambouseraie en prime. Avec beaucoup, beaucoup moins de monde qu'à Arashiyama !
Une vraie chaumière.
Dans l'un des pavillons sont exposés des rouleaux avec de savoureuses peintures. Toutes sur le thème : ouh les méchants démons qui menacent les pécheurs ! Ceux qui commettent des péchés, hein, pas les pêcheurs qui traquent l'espadon.
Celui-ci montre un exceptionnel talent graphique : mouvement, expression... Un style cartoonesque avant l'heure !
Et celui-ci, c'est l'ancêtre de Toy Story. Des objets qui prennent vie…
Mais la puissance du bonze les met en déroute !
Etonnant jardin zen sculpté. Très apaisant, une vraie invite à la méditation. Surtout qu'on est bien tranquille dans ce temple !
Quelques flamboyances d'érables, annonciatrices des feux de l'automne.
L'intérieur de ce pavillon est exceptionnel. No photo, il faut me croire sur parole.
Et, sur les sommets, une curiosité : deux petites maisons de thé, rustiques. Comment échapper au bruit du monde.
En redescendant, la petite bambouseraie. Loin d'être aussi étendue qu'Arashiyama, mais qu'est-ce qu'on y est tranquille ! J'y rencontre tout de même une famille allemande, ça me change des Italiens.
Je sors, en remarquant avec surprise cette statue de taureau. On dirait un Nandi indien, non ?
Entoku-in
C'est un très agréable sanctuaire au format réduit, absolument pas indispensable, mais la visite très paisible procure beaucoup de plaisir. Outre ses mini-jardins, ses mini-pavillons, on peut y admirer une intéressante collection de peintures d'artistes renommés (mais inconnus pour un Européen, hélas).
Ce fusuma représente un dragon blanc. Hein ? Où ça ?
Serait-ce Néné dans ses dernières années ? La gardienne n'en a aucune idée.
Ah, je vois le dragon ! Au centre, à cheval sur deux fusuma, on repère la tête. C'est une forme métaphorique de Totoyomi Hideyoshi. Mais si, le mari défunt !
Le jardin zen, c'est quand même toujours efficace. Même simplement ratissé comme ici. Alors franchement, pourquoi s'embête-t-on tellement avec les pelouses chez nous ? Qu'il faut tondre, désherber, arroser, etc, etc. En ces temps de restrictions d'eau en Europe, voici une solution toute trouvée. Le matériau, c'est un banal gravier blanc, d'assez importante granulométrie. Tous nos Leroy Merlin et autres Bricorama doivent en proposer !
Je n'ai aucune information sur cette peinture, à gauche. Elle semble sortie d'un vase grec. Je n'ai encore rien vu au Japon d'approchant. Tout renseignement éclairé sera bienvenu !
Ah ! J'aime bien ces essais de renouveau. Thème traditionnel mais style épuré avec de grands aplats. Palette très resserrée mais vigoureuse (bon, et j'adore le bleu et le vert, ça joue aussi).
Un très très beau fusuma (panneau coulissant, je rappelle), motif sur motif. Ces grands pins montrent une sûreté graphique indéniable (à l'encre, on ne peut pas se louper) et une synthèse dans la composition.
Il y a une légende, mais toute en kanjis que je ne connais pas (sauf le caractère homme, je suis bien avancé). Ce kakemono qui semble éclairé par l'arrière est tout à fait sidérant. Il y a du Miro là-dedans. Mais quelle époque ? Ca, ce n'est pas écrit, pourtant je connais mes chiffres en japonais.
J'en avais vu à Osaka, l'an dernier. Très astucieux meuble-escalier amovible qui permet d'atteindre la réserve dans un magasin.
Couloir clos, plutôt rare. Celui-ci laisse mieux passer la chaleur que l'air.
Mini jardin d'eau (enfin, quand il y en a).
Ca fait toujours le même effet. On s'assied, on se tait, on contemple.
Plusieurs portraits du cher disparu, facile à identifier à la longue.
Et un autre rouleau dans la même veine que celui du Kodai-ji. Le talent de l'artiste est époustouflant ! Je recommence : sens aigu du mouvement, talent très poussé pour dessiner des expressions, palette colorée de dessin animé. La corde à tête de serpent est très vivante ! En prime, un talent pour suggérer l'espace en deux coups de pinceau.
Je n'ai fait qu'une photo à cause des reflets décourageants.
Et pour finir, de beaux fusuma contemporains. Plutôt réussis, je trouve.
16:00, et je n'ai pas déjeuné ! Heureusement, un élégant café tout proche propose quelques plats.
L'inévitable petite salade au chou râpé et boule de salade de pommes de terre.
Une spécialité que je n'avais pas goûté : un ragoût avec du bœuf, beaucoup d'oignons, et une sauce tomates fraîches et miso noir, un peu relevée. Hormis le miso, on dirait de la cuisine provençale ! C'est vraiment bon. "Special Kyoto Pot" m'énonce fièrement la jeune serveuse rougissante.
Et j'en profite pour tester aussi un gâteau que je vois partout, le Su-i-sé-lo-lé. Swiss Roll, en clair. Un gâteau roulé au café. Pas mal du tout !
1580 yens le tout, y compris un thé Hojicha glacé.
Il est trop tard pour envisager d'autres visites. Je flâne en redescendant en scrutant les boutiques de céramiques. Les prix ne diminuent pas en proportion de la pente.
Finalement, je reviens dans le centre, en passant une fois de plus la rivière Kamo.
Tiens ! un canal auquel je n'avais pas prêté attention ! Le Japon est vraiment un pays sillonné de voies d'eau, partout.
Je poursuis vers le marché Nishikin.
Une salle entière de jeux à pinces, où on est sensé guider la pince pour récupérer l'objet convoité.
Je tourne un bon moment dans divers magasins. Vers 20:00, après avoir pesé le pour et le contre (manger ? ne pas manger ?), je décide de chercher une enseigne qui me serve de la soupe ou de la salade. J'entre là, alléché par le menu extérieur (salade César, mmmm).
Ah oui, mais la salade, y en a plus. De la... ? Y en a plus non plus. Bon, c'est vrai qu'il est tard, le service est quasiment terminé. Mais qu'est-ce qu'il reste alors ? Des supagheti. Ah tant mieux!
Ce sont donc des spaghettis, des vrais, avec jambon, crevettes, courgettes, oignons rouges et ail frit. 610 yens. Un peu gras mais savoureux. Crevettes et jambon s'accordent beaucoup mieux que je ne l'aurais cru.
En rentrant, je passe devant cet immeuble à karaoké. De jeunes filles surexcitées font le show, quasiment en vitrine. Le karaoké est un bon moyen pour évacuer la pression (et j'ai vraiment l'image de la cocotte-minute en tête) chez ce peuple si discipliné.
Les salles de pachinko, ça se voit de loin !
Dernier soir sur Pontocho, ses terrasses illuminées, ses promeneurs le long de la rivière.
Je prépare mes bagages ce soir car demain matin, je pars pour Fujikawaguchiko.
Je dois dire que j'ai encore passé des jours merveilleux à Kyoto, que cette cure de temples ne m'a jamais lassé ; je suis encore tombé sous le charme de l'intense beauté de ses jardins.
J'avais envisagé plusieurs musées, et il me reste encore des temples prévus à voir. Ce sera pour un prochain voyage. Et, promis, je retournerai au Ninna-ji !
I love your pics of japanese gardens. Superb post !
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Thank you very much for your nice message !
SupprimerTrès vivant article, de l'érudition et beaucoup d'humour. Un régal de vous lire.
RépondreSupprimerMathilde
Merci beaucoup pour ce commentaire enthousiaste !
SupprimerMagnifique temple. Un excellent article qui donne envie d'y aller !
RépondreSupprimerMerci beaucoup, cher Anonyme ! Votre commentaire me fait très plaisir.
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