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dimanche 26 janvier 2020

Barcelona : récital Javier Camarena au Liceu


Ce soit, c'est fête. Javier Camarena donne un récital au Liceu, avec un programme exceptionnellement copieux : que des airs d'opéra, neuf au total. C'est l'occasion d'entendre un des grands ténors belcantistes du moment dans une série d'airs comme on en entend rarement !



Angel Rodriguez, Javier Camarena

Javier Camarena n'est pas un inconnu au Liceu ; il y a notamment conquis le public avec son exceptionnel Tonio de la Fille du Régiment et son non moins remarquable Arturo des Puritani, l'an dernier. Ce soir, pour ce récital, c'est son pianiste Angel Rodriguez qui l'accompagne.

Javier Camarena

En préambule, le ténor déclare qu'il est enrhumé depuis plusieurs jours. Il peut chanter (ouf !) et espère que tout se passera bien, mais il n'est pas complètement remis. La grippe des ténors frappe fort à Barcelone en ce moment, le Radamès d'hier en sait quelque chose.

Javier Camarena

Première partie d'opéras en français : Camarena débute avec "Ah lève-toi soleil", avec récitatif de Roméo et Juliette, admirable de lumière dans le timbre et d'articulation,  suivi d'"Un ange, une femme inconnue" de La Favorite, magnifiquement tenu et stylé. Le "Vainement ma bien-aimée" du Roi d'Ys est une surprise car je ne savais pas que Javier l'avait inscrit à son répertoire. Son interprétation est un enchantement, avec des demi-teintes s'allégeant jusqu'à d'impalpables piani, avec une ligne de chant scrupuleuse. Deux Donizetti créés pour l'Opéra de Paris pour finir ; de son dernier opéra, Dom Sébastien, roi de Portugal (sur un livret de Scribe), l'air "Seul sur la Terre", servi avec une émotion consommée et une grande maîtrise de la palette. Enfin, le tube "Ah mes amis" de La Fille du Régiment lui permet d'aligner ses neuf contre-ut impeccables, avec un chic étourdissant, ce qui lui vaut de longs applaudissements.

Javier Camarena

En seconde partie, textes en italien : "L'amo tanto" des Capuleti e Montecchi,  qu'on a bien rarement l'occasion d'entendre si bien servi. L'air "Fra poco a me ricovero", avec récitatif, de Lucia di Lammermoor montre la pureté de style ; mais il faut à Javier toute sa technique pour éviter que sa voix ne se brise dans un aigu auquel le soutien vient à défaillir. La maladie annoncée se rappelle soudain à nous.

"M'appari tutt'amor", la version italienne du "Ach so fromm" de Martha, fut un vrai tube et tous les ténors célèbres l'ont un jour chanté. C'est un régal, d'autant que la voix longue du ténor lui permet de ciseler ses phrases et de le déguster lentement, comme une gourmandise. Enfin, il se lance dans la série complète d'Alfredo de Traviata, le récital "Lunge da lei", l'aria "De' miei bollenti spiriti" et la cabalette "O mio rimorso". C'est beaucoup et on sent la fatigue poindre, mais le chanteur ne se ménage pas et gratifie le public d'un nouvel éventail de couleurs, avec encore un insolent registre aigu. Triomphe, évidemment.
La salle est archi-comble ; on a ajouté des sièges sur scène.

Point d'airs d'opéra supplémentaires après ce programme surabondant. Le  premier bis est en espagnol,  “Flor roja” de Los Gavilanes, une zarzuela de Guerrero, met en valeur la délicatesse de l'interprétation. Pour le second, Camarena s'exprime en catalan (en faisant le pitre avec le Google Translate de son téléphone) avant de retourner la salle avec “Rosó” de Josep Ribas ; la sensibilité du ténor, et plus encore l'hommage au public catalan déclenchent un inimaginable enthousiasme, avec vingt minutes d'applaudissements. C'est vrai que le public du Liceu a toujours su fêter ses chanteurs, et reste un des meilleurs publics que je connaisse !

Angel Rodriguez, Javier Camarena

Un superbe et rare récital, une soirée inoubliable !

Javier Camarena
Hélas, l'accès à sa loge est férocement gardé (les cerbères vérifient l'identité de chacun et comparent avec leur liste sur trois pages) et le récital est suivi d'un cocktail... J'abandonne. J'insère cependant une photo à la sortie, prise après son Arturo ici même.

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