Washington : Impressionnistes (National Gallery, aile ouest)

Je connais un certain nombre de musées américains avec de riches collections de peintres impressionnistes.

Cela n'est pas si surprenant si on se rappelle que de nombreux peintres étudièrent à Paris au XIXe siècle et côtoyèrent les principales figures ; Mary Cassatt, amie de la femme de Havemeyer, a sans doute joué un rôle dans la constitution de la célèbre collection de celui-ci, visible largement au Metropolitan Museum de New York.

Par ailleurs, l'industrialisation des Etats-Unis fait naître des hommes riches qui se mettent à acquérir des œuvres d'art, si possible des dernières tendances à la mode en Europe. Certains achètent à la chaîne lors de leurs déplacements à Paris.

Et, dans l'autre sens, le développement de cette clientèle nouvelle est clairement perçu par les marchands d'art, qui n'hésitent pas à ouvrir des galeries à New York.

Degas, Monet sont très largement représentés dans des ensembles très opulents où figurent aussi des peintres d'une notoriété moindre, comme Bazille (dont je n'ai pourtant presque rien vu lors de ma visite), au milieu de toutes les têtes d'affiche. En outre, l'intérêt de ce musée est de présenter souvent des tendances, des sujets variés pour ces célébrités.

Paul Cézanne

L'exemple de Cézanne illustrera bien mon propos : portraits, natures mortes, paysages d'Aix ou d'ailleurs, style encore classique ou expérimentation à la limite de l'abstraction. Malgré un accrochage un peu éparpillé, la collection permet de bien saisir le travail du peintre.

Paul Cézanne, Le Jardinier Vallier - La rivière

Paul Cézanne, Château Noir

Château Noir, c'est une construction du XIXe inachevée sur la route d'Aix au Tholonet, que Cézanne peignit à plusieurs reprises pendant presque dix ans. Il possédait l'atelier des Lauves d'où sortaient de nombreuses natures mortes mais le travail sur la nature lui restait indispensable. Cette construction ruinée contrastant avec la pinède alentour l'attirait régulièrement.

Paul Cézanne, Nature morte avec pommes et pêches

Paul Cézanne, Paysage près de Paris

Paul Cézanne, Maisons en Provence - La Vallée de Riaux près de l'Estaque

Paul Cézanne, Le garçon au gilet rouge

Il existe plusieurs versions de ce garçon au gilet rouge, debout ou assis. On ne peut pas dire qu'il ait cherché à flatter son modèle, à moins que ce teint blafard soit destiné à contraster avec le gilet du titre. Mais on sent le cubisme poindre ici, et cette attitude nonchalante, déhanchée, est plutôt rare.

Paul Cézanne, La Maison du Père Lacroix

Paul Cézanne, La bouteille de menthe

La surprise, dans cette nature morte que je ne connais pas, c'est de voir que la célèbre bouteille à l'étiquette rouge existait déjà !

Paul Cézanne, Au bord de l'eau - Vase de fleurs

Paul Cézanne, Arlequin

On oublie souvent que le portrait est une large partie de l'œuvre de Cézanne. Autour de cent cinquante toiles sur le sujet, je crois. Le thème de l'Arlequin sera abondamment repris par Picasso, et je trouve le fond rose et bleu carrément prémonitoire.

Paul Cézanne, Poires

Vincent van Gogh

Provence et Auvers sur Oise, paysages, nature morte et portrait. Là aussi, on fait le tour des principaux motifs.

Vincent van Gogh, Un Mas en Provence

Lumineux tableau qui montre une ferme (un mas), je suppose dans les environs d'Arles. Le travail d'utilisation du fond de la toile est intéressant.

Vincent van Gogh, Nature morte : oranges, citrons, gants bleus

Une curieuse association pour une nature morte. Je pense que c'est l'opposition de couleurs qui a suscité l'assemblage.

Vincent van Gogh, Champs de blés verts à Auvers

Un tableau plus tourmenté, tout en ondulations, avec l'élégance d'une palette étroite.

Vincent van Gogh, Jeune fille en blanc

Je ne connaissais absolument pas ce tableau que je trouve très étonnant et créatif. Recherche de techniques (les points, peut-être obtenus avec le manche du pinceau), alternance de dessin (dans le chapeau, les motifs de feuilles symbolisées) et de peinture, avec ou sans contour.

On sait que van Gogh fut fasciné par les graveurs japonais et que la Provence lui semblait "l'équivalent du Japon". Je me demande s'il ne faut pas ici voir l'influence de l'ukiyo-e, cet art de la gravure japonaise. 

Vincent van Gogh, La Mousmé

La mousmé, c'est un mot japonais (musume) rapporté par Pierre Loti pour désigner une jeune fille. Cette fois, aucun doute donc sur l'influence.
 Il s'agit bien d'une jeune Arlésienne, avec des vêtements audacieux (une fashionista de l'époque ?), mais le choix des lignes et des aplats rappelle aussi le Pays du Soleil Levant.

Vincent van Gogh, Le bébé Roulin

Edgar Degas

Danseuses, portraits, chevaux, les grands thèmes de la peinture sont bien là. Au rez de chaussée, une énorme collection de statues complète ces toiles. J'ai pris des photos, mais je ne sais pas si j'aurai le temps de les montrer !

Edgar Degas, La leçon de danse

Un vrai récit dans ce tableau qu'on lit guidé par la perspective. C'est très étudié malgré une impression de rapidité dans la peinture.

Edgar Degas, Quatre danseuses

Très étonnant. Un tableau qui multiplie les techniques, entre ce dessin très étudié des bustes et les délicates nuances des têtes, et les effets de flou, presque de pastel et d'aquarelle.

Edgar Degas, Avant le ballet

Dans l'esprit du premier. Un format souvent retenu par Degas et par Boudin pour ses scènes de plage !

Edgar Degas, Mme René de Gas

Trois somptueux portraits, très différents. Le premier me fait penser à Whistler avec son harmonie coloriste, le second affiche ouvertement son influence japonaise, le troisième me semble plus psychologique.

Ici Degas peint une de ses proches : Degas est le nom d'artiste d'Hilaire Germain Edgar de Gas. Le portrait de monsieur, René de Gas donc, est au musée d'Orsay si je ne me trompe pas.

Edgar Degas, Mme Camus

Edgar Degas, Mlle Malo

Edgar Degas, La Course de chevaux

Dans la grande tradition des scènes de genre, un nouveau sujet apparaît au XIXe siècle, dont Degas s'empare pour en faire une série. Personnages en plein air, paysage rapidement esquissé, et ici une influence japonisante claire dans ce trait qui ceint les silhouettes. Par ailleurs, les touches se fondent comme s'il s'agissait d'aquarelle…

Edgar Degas, Le Jockey à terre

Fameux tableau, vraiment saisissant quand on se trouve devant. Degas a su communiquer le sentiment de la catastrophe.

Edgar Degas, Chevaux dans un pré

Paul Gauguin

Polynésie et Pont Aven, plus un autoportrait insolite.

Paul Gauguin, Te Pape Nave Nave (Eau délicieuse)

Toile un peu mystérieuse avec, en arrière-plan, la déesse polynésienne de l'au-delà, Hina. Gauguin pensait se suicider quand sa toile serait terminée.

Paul Gauguin, Les Baigneuses

Paul Gauguin, Fatata te Miti (Au bord de la mer)

Peint pendant le premier voyage de Gauguin à Tahiti, ce tableau reprend le thème familier des nymphes, en lui donnant une touche exotique par l'emploi de couleurs intenses.

Paul Gauguin, Parau na te Varua ino (Paroles du Diable)

Visiblement le même arbre a servi de décor pour les deux toiles, et il y occupe la même place. Mais le thème est différent, et le démon aux yeux effrayants pousse la femme à se retourner tout en cachant sa nudité. Je trouve toujours intéressante cette volonté de Gauguin de ne pas se limiter aux paysages et aux portraits, mais de montrer une culture, même transformée par l'intensité d'une palette imaginative.

Paul Gauguin, Meules de foin en Bretagne

Période Pont-Aven, avec sans doute du cloisonnisme, cette technique qui consiste à placer des aplats de couleur dans des zones délimitées au trait, comme le cloisonné chinois.

Paul Gauguin, Autoportrait au nimbe

Voilà encore une œuvre qui se rattache directement au Japon, peinte au Pouldu. Gauguin y réinterprète des symboles religieux, nimbe, serpent et pomme.

Paul Gauguin, Danse bretonne des filles à Pont-Aven

Edouard Manet

Là encore, diversité des peintures : natures mortes épurées, scènes parisiennes ou évocations d'Espagne, portrait au bistrot…

Edouard Manet, Le Melon

Edouard Manet, Huîtres

Un sujet souvent traité dans l'art des Pays-Bas au XVIIe siècle (Heda…) mais ici repris avec une simplicité affichée qui dissimule une grande virtuosité.

Edouard Manet, Nature morte avec un melon et des pêches

Edouard Manet, Le Vase de cristal

Edouard Manet, Bal masqué à l'Opéra

L'opposition des queues de pie noires, presque des uniformes, avec les couleurs du Carnaval, dynamise une toile assez documentaire.

Edouard Manet, Le Chemin de fer

C'est le dernier portrait du modèle préféré du peintre, Victorine, représentée quelque peu mélancolique. La petite fille de dos (la fille du voisin de Monet, Hirsch) semble fascinée par le sujet, dont nous ne voyons guère que le panache de fumée. Pas de perspective ici mais de forts contrastes, notamment entre les vêtements, comme dans le Déjeuner sur l'herbe.

Edouard Manet, La Prune

L'actrice Ellen Andrée pose ici dans un décor de café reconstitué en atelier. Douce peinture mélancolique.

Edouard Manet, Le Vieux Musicien

Un tableau nettement moins connu des débuts du peintre (1862) où on retrouve des figures connues, comme l'homme au haut-de-forme noir qu'on voit aussi en Buveur d'absinthe.

Edouard Manet, L'homme mort

Le torero mort faisait à l'origine partie d'une plus grande composition sur le thème de la corrida, mais Manet décida de l'isoler en changeant son titre. L'absence de décor lui donne une grande expressivité. L'influence des peintres espagnols, Goya et Velázquez en tête, me semble particulièrement perceptible.

Edouard Manet, L'Acteur tragique (Rouvière en Hamlet)

Claude Monet

Une riche collection pour ce peintre très apprécié du public américain. Pas de Nymphéas dans les salles aujourd'hui mais la plupart des thèmes sont bien représentés. Je retrouve tout cela avec plaisir après la riche exposition de l'Albertina à Vienne.

Claude Monet, Nature morte avec une bouteille, une carafe, du pain et du vin

Une sage nature morte aux remarquables effets de matières.

Claude Monet, Palazzo de Mula, Venise

Magnifique peinture vénitienne comme un pastel.

Claude Monet, La Seine à Giverny

Claude Monet, Waterloo Bridge, jour gris

Trois tableaux londoniens, avec un superbe Parlement.

Claude Monet, Le Parlement, coucher de soleil

Une des dix-neuf toiles réalisées sur le même sujet entre 1900 et 1905. Toujours une vue depuis le St Thomas Hospital.

Claude Monet, Waterloo Bridge, coucher de soleil

Claude Monet, Berges de la Seine, Vétheuil

Monet emménagea en 1878 à Vétheuil, dans l'Oise, et il y peignit environ cent cinquante toiles. La Seine est alors un de ses sujets récurrents.

Claude Monet, Fleurs d'artichauts de Jérusalem

Claude Monet, La Cathédrale de Rouen

La Cathédrale de Rouen, une des séries intensivement explorées pour travailler les variations de la lumière.

Claude Monet, Les Saules

Claude Monet, Femme à l'ombrelle - Mme Monet et son fils

Si nous, Français, connaissons mieux le tableau du Musée d'Orsay où la femme à l'ombrelle est seule (dix ans après celui-ci), celui de Washington n'en est pas moins célèbre. Il fut exécuté en une seule séance, en donnant une impression d'instantané. La position de Camille, vue en contre-plongée, lui apporte une certaine monumentalité.

Claude Monet, Le Jardin de l'artiste à Vétheuil

On croirait que le petit Jean, le fils de Claude et Camille, sort d'un tableau pour entrer dans l'autre : même chapeau, tenue similaire. Les lignes strictes du toit et de l'allée en perspective cavalière structurent le tableau, mais c'est surtout le contraste entre l'enfant et les tournesols gigantesques et la palette ensoleillée qui retiennent l'attention.

Claude Monet, Bazille et Camille

Monet et Bazille emménagèrent dans un atelier parisien et Claude rencontre alors Camille Doncieux, une délicieuse jeune fille. Est-ce Bazille qui les présenta ? Je ne sais toujours pas s'il s'agit d'une hypothèse ou si le fait est avéré. En tout cas, un très charmant tableau de l'époque du Déjeuner sur l'herbe.

Claude Monet, Sainte-Adresse

Assez classique tableau de barques sur le rivage, dans une composition qui rappelle ceux des peintres néerlandais.

Claude Monet, Voiliers sur la Seine à Rouen

Claude Monet, Le Berceau - Camille avec le fils du peintre, Jean

Claude Monet, Intérieur, après dîner

Camille Pissarro

La nature, les jardins, Paris. Des tableaux colorés, d'autres plus adoucis. 

Camille Pissarro, Verger en fleurs à Louveciennes

Le peintre né aux Antilles s'installa à Louveciennes, qu'il dut fuir précipitamment quand l'armée prussienne arriva. Il y laissa presque  mille cinq cents toiles, et n'en retrouva qu'une quarantaine après la guerre de 1870.

Camille Pissarro, La Haie

C'est le même thème qui apparaît dans la célèbre toile de Bastien-Lepage, Les Amoureux au village.

Camille Pissarro, Paysage, Île de France

Pissarro a réinterprété à sa manière la tradition du paysage animé. Très souvent, dans ses toiles qui montrent une nature plus ou moins sauvage, on découvre un personnage, discret, non identifiable, mais qui est bien présent. Un très joli tableau lumineux, ici.

Camille Pissarro, Les Pâtis, Pontoise

Dans les années 1860, Pissarro s'installa à Pontoise, la campagne proche de Paris, et il y peignit avec gourmandise les champs et les collines. C'est la période où Gauguin vint s'installer quelque temps chez lui.

Camille Pissarro, Le Jardin de l'artiste à Eragny

Dans les années 1880, Monet, le parrain d'un de ses fils, lui prête l'argent pour acheter une maison, La Pommeraie, où il passera ses dernières années.

Camille Pissarro, Place du Carrousel, Paris

C'est à Paris que mourra Pissarro, et la capitale revient souvent dans les toiles des dernières années. Je ne connais pas celle-ci, séduisante vue des Tuileries contrastant avec les bâtiments du Louvre.

Camille Pissarro, Le Louvre, après-midi, temps pluvieux

Une  vue de la Seine, surtout, avec une palette à la Marquet.

Camille Pissarro, Boulevard des Italiens, le matin, rayon de soleil

Les grands boulevards d'un Paris revu par Haussmann. Je trouve le tableau intéressant mais, franchement, il ne m'emballe guère.

Henri de Toulouse-Lautrec

Une huile sur toile, éblouissante, quelques cartons pour évoquer Toulouse-Lautrec. Un utile contrepoint à l'exposition de Barcelone.

Henri de Toulouse-Lautrec, Rue des Moulins, 1894

C'est rue des Moulins que se trouvait la maison close La Fleur Blanche où Toulouse-Lautrec avait sa chambre. L'artiste difforme (d'un mètre cinquante) et alcoolique trouva un refuge affectueux dans ce milieu qu'il peignit à plusieurs reprises.

Henri de Toulouse-Lautrec, Maxime Dethomas

Henri de Toulouse-Lautrec, Marcelle Lander dansant le boléro dans Chilpéric

Magnifique toile avec un remarquable travail sur la lumière de la scène.

Henri de Toulouse-Lautrec, Quadrille au Moulin Rouge

Le Moulin Rouge, ce fameux cabaret au pied de Montmartre, ouvrit ses portes en 1889, et son quadrille comportait des vedettes telles que la Goulue. Il me semble bien la reconnaître ici.

Henri de Toulouse-Lautrec, Dame au chien

Auguste Renoir

Je ne peux pas écrire que j'adore tous les tableaux de Renoir. Sa palette rougeoyante ne m'enchante pas toujours, loin de là.

Auguste Renoir, Rameurs à Chatou

C'est le cas de ce tableau, qui me paraît un peu trop éclatant. Mais j'aime bien cette scène, avec un rameur qui invite des personnages bien habillés à grimper dans son embarcation. Je trouve un tel contraste entre les costumes et la situation ! Et cela m'évoque un autre tableau que je trouve fascinant, Le Déjeuner des Canotiers, avec un cadre voisin dans les environs de Paris.

Auguste Renoir, La Danseuse

Beaucoup de délicatesse. Renoir a souvent réussi ses portraits d'enfants.

Auguste Renoir, La petite fille à l'arrosoir

Celui-ci est justement célèbre.

Auguste Renoir, Diane

Un tableau de jeunesse, peint à vingt-six ans, où le style de Renoir n'est pas encore affirmé. Il a peint une femme, un trophée de chasse, bien plus qu'une déesse. C'est tout de même un thème d'exception dans son œuvre. A ma grande honte, je n'avais jamais entendu parler de ce tableau.

Auguste Renoir, Mlle Sicot

Remontons dans le temps. Voici un tableau peint à vingt-quatre ans, cette fois. Peinture encore sage mais un éclat éblouissant de ce violet mis en valeur par le vert du fauteuil.

Henri Fantin-Latour

Peu d'œuvres présentées aujourd'hui, pas de portrait (il y en a pourtant dans les collections, je pensais voir le Portrait de Sonia) ni de scène de groupes comme son fameux Atelier aux Batignolles. D'exquises natures mortes, un genre qu'il a souvent traité car elles se vendaient facilement. Whistler, ami proche du peintre, fit beaucoup pour lui assurer une popularité dans le milieu anglophone.

Henri Fantin-Latour, Roses de Nice sur la table

La simplicité n'ôte rien à la maîtrise du peintre, qui rend avec réalisme aussi bien les pétales un peu fripés que la texture des feuilles.

Henri Fantin-Latour, Pensées

Le fond en gris a souvent été utilisé par le peintre pour mettre ses natures mortes en valeur. La composition est peut-être un peu exubérante, mais quel magnifique tableau !

Henri Fantin-Latour, Nature morte

Une nature morte un peu éparpillée qui me rappelle les tables mises des Néerlandais. Et, comme eux, il semble avoir choisi les objets pour montrer son savoir-faire dans le rendu des textures.

Henri Fantin-Latour, Nature morte avec des raisins et un œillet -

Nature morte au pot de moutarde

J'aime beaucoup ces deux minuscules toiles, particulièrement la seconde.

Gustave Caillebotte

Je n'écrirai jamais assez combien la rétrospective parisienne fut un déclic, mettant sur le devant de la scène un peintre qu'on ne remarquait pas assez dans les collections. Je me demande toujours si ce n'est pas sa condition d'artiste riche qui le mit à l'écart dans la postérité, alors qu'il était un mécène généreux, et proche des autres peintres. Il fut d'ailleurs le témoin de Monet à son mariage.

Gustave Caillebotte, Périssoires sur l'Yerre

Caillebotte faisait partie du Cercle de la Voile et il était un passionné de régates. Cette scène, située à proximité de sa propriété, montre des embarcations effilées et fragiles, les périssoires. Les personnages s'intègrent parfaitement dans le cadre naturel, rendu avec une parfaite technique.

Gustave Caillebotte, Dahlias, jardin au Petit Gennevilliers

Caillebotte avait acquis une propriété au Petit Gennevilliers et, comme Monet, c'était un passionné d'horticulture qui reproduisit souvent son jardin. Ses vastes moyens lui permirent de construire cette grande serre, où il cultivait une précieuse collection d'orchidées rares importées à grands frais, et même d'installer un système d'arrosage automatique.

Gustave Caillebotte, Dahlias, jardin au Petit Gennevilliers (détail)

Ses longs traits suffisent à dépeindre un portrait avec réalisme.

Quelques autres français

Une partie fourre-tout où j'ai placé quelques toiles, pas forcément impressionnistes, mais françaises, et qui m'ont marqué.

Eugène Delacroix, Tigre et serpent - 

Deux études d'un indien de Calcutta, assis et debout

Une série de tableaux orientalistes, où Delacroix côtoie le moins fameux Regnault.

Henri Regnault, Tête d'Abyssinien

Alexandre Steinlen, Les Lavandières

Intéressante et originale composition de Steinlen, le peintre de Montmartre. Curieusement, ces silhouettes me paraissent sorties d'un tableau de Brueghel.

Odilon Redon, Saint Sébastien

Redon et sa douce peinture symboliste… Un Saint Sébastien vraiment réinterprété avec des flèches minces, difficiles à percevoir, et une Pandore avec sa fameuse boîte.

Odilon Redon, Pandore

Eugène Boudin, L'heure du bain à Deauville

Deux Boudin dans son sujet favori, la côte normande et son public. C'est toujours difficile de penser à des baigneurs en voyant ces costumes de ville.

Eugène Boudin, Côte bretonne

Gustave Courbet, Jeune femme à la lecture

Un Courbet éblouissant de simplicité et de naturel.

Camille Corot, Le Passeur immobilisé, souvenir d'un lac italien

100 % Corot.

Antoine Vollon, La Motte de beurre

Les grands ciels tourmentés de Vollon ne me passionnent pas vraiment, mais cette nature morte franche et épurée me plaît beaucoup.

Vitrine de petits formats de Georges Seurat

Une série de Seurat, peintre bien représenté dans les collections américaines. Ici une série de "croquetons", ces petites huiles sur panneau qui constituent une large partie de son œuvre. Le pointillisme qu'il inventa fut une étape majeure de l'histoire de l'art. Il fit l'admiration de Pissarro et les fauvistes, les cubistes et même, plus tard, les futuristes, se revendiquèrent comme ses héritiers.

Georges Seurat, Côte à Port-en-Bessin, Normandie

C'est un artiste qui, hormis son importance historique, me séduit toujours.

Mary Cassatt

Logiquement, on trouve ici une respectable série de toiles de Mary Cassatt, excellente artiste impressionniste qui joua un rôle prépondérant dans la diffusion de ce mouvement aux Etats-Unis.

Mary Cassatt, Femme au zinnia rouge

Née dans une famille aisée de Pennsylvanie (d'origine française, les Cossart), elle passa sa vie entre les deux continents. Venant en Europe pour apprendre la peinture (elle obtint sa carte de copiste du Louvre), retournant en Amérique pour fuir la France en guerre, revenant pour visiter les grands musées d'Italie, d'Espagne ou de Belgique, retournant pour participer à des expositions… Elle acheta finalement un château dans l'Oise et une villa à Grasse.

Elle était donc une artiste extrêmement cultivée, et son contact avec les grands maîtres influença à chaque fois sa peinture : le travail sur la lumière avec Rubens, la couleur avec Le Corrège, le soin du trait avec les Japonais comme Utamaro.

C'est Degas, impressionné par son talent, qui la poussa à exposer avec les Impressionnistes. Elle fut également proche de Pissarro, un moment exclus du groupe parce qu'il était étranger comme elle (né aux Antilles, de nationalité danoise), et qui exposa avec elle.

Une artiste singulière, attachante, avec une forte personnalité artistique.

Mary Cassatt, Petite fille sur un fauteuil bleu

L'abandon de l'enfance… Une scène jugée choquante à l'époque, devenue plus tard un de ses plus célèbres tableaux.

Mary Cassatt, Femme à l'éventail

Le japonisme à l'œuvre. Et aussi, me semble-t-il, davantage d'impressionnisme dans le traitement de ces touches qui donnent une illusion de rapidité. Illusion seulement, car on voit bien combien ce tableau est très minutieusement exécuté, avec ces petites touches de rouge savamment distribuées pour réveiller le vert un peu pâle.

Mary Cassatt, La promenade en barque

Une autre artiste, non ? C'est une de ses très célèbres toiles, très japonaise aussi ; la ligne d'horizon très haute en est une référence claire. La composition est très rigoureuse : lignes horizontales jaunes des bancs et de la côte, courbes de la barque et de la voile, avec, en symétrie, le bras et le torse du rameur.

Trompé par cette rigueur de la structure, on croit voir une représentation d'une traversée tranquille. En fait, si le canotier est bien calé avec un corps en tension (bras tendus sur les rames, pied contre le banc), la femme est juste "posée" sur le bord, avec un bébé qui semble gigoter dangereusement. D'ailleurs, cette mère lui jette un regard inquiet, alors que l'enfant a les yeux fixés sur l'homme.

Mary Cassatt, Jeune Fille à la fenêtre

Une autre grande réussite avec cette Jeune Fille à la fenêtre, où les droites de la grille, de la fenêtre, des toits s'opposent aux courbes de son sujet. Semblable contraste avec des verts et des bleus qui valorisent un blanc éclatant. Malgré tout, l'intérêt de la demoiselle comme de l'animal est hors champ, et cet agaçant mystère suffit à créer une tension dans le tableau.