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vendredi 27 juillet 2018

Aix : Exposition Nicolas de Staël en Provence à l'Hôtel de Caumont




L'Hôtel de Réauville, dit Hôtel de Caumont, fut construit à Aix dans la première moitié du XVIIIe siècle. C'est Robert de Cotte, l'architecte de la chapelle du Château de Versailles, qui fut chargé de cette réalisation. Parmi les réalisations de ce prolifique créateur, on trouve la Place Bellecour de Lyon, le Palais du Tau de Reims, ainsi que de nombreux palais épiscopaux.



Architecte-décorateur, il se chargea souvent de l'aménagement des bâtiments et diffusa le "goût français" à l'étranger (en Italie et en Allemagne principalement).



A Aix, l'ocre de la pierre de Rognes magnifie ce bel hôtel particulier, agrémenté d'un jardin tout mignon.



Les ajouts contemporains s'y inscrivent sans heurt.


Cette splendide bâtisse a été méticuleusement restaurée il y a quelques années et est devenu un centre d'art qui programme de belles expositions.










 Nicolas de Staël en Provence


Celle du moment propose une rétrospective d’œuvres de Nicolas de Staël, ce peintre d'origine russe, né à Saint Petersbourg, venu en Pologne, puis en Belgique, avant de vivre la plupart de sa vie en France.


Fasciné par l'Italie, et notamment par la Sicile à laquelle il consacra beaucoup de tableaux (et même peints longtemps après, comme des souvenirs), il voyagea tout autour de la Méditerranée.


Il rencontra à Marrakech Jeannine, qu'il suivit à Nice pendant la guerre où il rencontra une colonie d'artistes exilés, les Delaunay, Jean Arp, Elena Vieira da Silva, Alberto Magnelli…


Sa peinture, d'abord abstraite après les inévitables débuts figuratifs, évolua avec le besoin d'individualité et de singularité d'un artiste qui refusa toujours de s'intégrer à une quelconque chapelle.


Dans les années 1950, il acheta une maison à Ménerbes dans le Lubéron, le Castelet.


Comme beaucoup de peintres avant lui (on pense toujours à Van Gogh dans ce cas-là), il fut fasciné par la lumière du midi. Il peignit avec une productivité énorme, plusieurs tableaux par jour parfois, si bien que Rosenberg, son galeriste news-yorkais, lui expliqua que ses clients pouvaient être rebutés par cette profusion.


Fleurs, natures mortes, paysages baignés de soleil, tous ses thèmes privilégiés se retrouvent dans cette période.


L'audace coloriste, avec de forts contrastes et une association régulière de couleurs complémentaires, éclate déjà.


Les tons complémentaires sont souvent à l'œuvre et dynamisent toujours la toile.



Un des éléments distinctifs est l'utilisation de couches superposées, souvent épaisses, qui laissent entrevoir la surface inférieure, mais aussi un travail sur les zones de contact, parfois transformées, fréquemment laissées blanches.



Le travail sur les arbres révèle l'acuité du regard pour repérer l'essentiel de la structure.



On voit que la ligne est fréquemment préférée à la courbe, ce qui m'évoque toujours un travail de mosaïste.


Ses bouquets, sans doute moins diffusés que ses paysages, montrent une technique originale où les couleurs multiples sont posées sous la couche finale, et apparaissent par fragments.




L'audace de la palette !



Les tons bleu-gris reviennent dans de nombreuses toiles et me font toujours penser à Geneviève Asse, qui approfondit obstinément ces tonalités.



Le regard acéré, qui épure le paysage jusqu'à son squelette, apparaît dans ces dessins au feutre américain.





Son style s'affirme avec des éléments récurrents, comme cette ligne d'horizon perturbée par quelques saillies.


Les aplats immenses portent les traces du couteau.


La couleur franche dégage une énergie incroyable. Nicolas de Staël est un des seuls peintres que je connais à avoir fréquemment employé le violet.



Les figures sont rares dans son œuvre. Cette femme recroquevillée semble porter un paysage sur elle, comme un manteau d'Arlequin.


Deux complémentaires bien repérables, crânement associées.




Jusqu'où va l'épure... Mais l'audace coloriste suffit à dynamiser la toile.










Nicolas de Staël se rendit plusieurs fois à Martigues, où il peignit les motifs que d'autres avaient retenus avant lui (Ziem, Dufy notamment). Mais le résultat est tout différent avec la puissance de cette simplicité intense.





Exposition riche de nombreuses œuvres inconnues, largement puisées dans des collections privées, qui permet d'admirer de vrais bijoux. Voilà plusieurs années que je n'en avais pas vu consacrée à ce passionnant artiste, et c'est un véritable plaisir.

J'ai lu jadis la captivante biographie par Laurent Greilsamer, Le Prince Foudroyé, et je ne peux qu'en recommander la lecture.

L'exposition est visible jusqu'au 23 septembre 2018, à ne pas manquer !

10 commentaires:

  1. I don't know this artist but I love his paintings. And the palais is amazing!
    Thanks for your great post!
    Annie

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  2. Magnifique article. Tes photos et commentaires permettent de se faire une bonne idée de cette expo, effectivement magnifique !
    Bon voyage, bises
    Françoise

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    Réponses
    1. Merci Françoise pour ce message affectueux !
      Gros bisous, bel été !

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  3. Quelle quantité de chefs-d'œuvre dans cette expo ! Magnifique article.
    Cylane

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  4. Une belle rétrospective. Merci pour votre article détaillé et vos nombreuses photos qui me permettent d'en profiter.

    Jeanne

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  5. Merci à vous, Jeanne, c'est très gentil de votre part.

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  6. Que de chefs d'oeuvre ! C'est magnifique.
    Une belle decouverte.
    Klara

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