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jeudi 26 août 2021

Patmos : la grotte de l'Apocalypse


 Haut lieu de la chrétienté, la grotte de l'Apocalypse est rattachée à Saint Jean et au livre qui clôt la Bible.

La grotte de l'Apocalypse est un de ces lieux qu'on considère différemment selon la foi ou l'histoire. Je vais essayer de faire le point sans prendre parti, en tentant de respecter tous les points de vue.

Pour les croyants, cette grotte est le lieu où Saint Jean de Patmos s'est exilé et a rédigé L'Apocalypse, un des textes les plus étonnants de notre patrimoine littéraire.

 

Cette version est établie au IXe siècle. Selon une interprétation des Actes de Saint Jean, l'auteur de l'Apocalypse est l'apôtre du même nom, exilé sur l'île par ordre de l'empereur romain Domitien.

Il cherche un endroit tranquille et découvre une grotte avec une source. Après avoir passé dix jours en ermite, il attend une voix qui lui ordonne de rester dix jours supplémentaires.

 

Jean est saisi d'extase et reçoit des visions extraordinaires. Il demande à son compagnon Prochore, un des premiers diacres de l'église (et l'auteur des Actes de Saint Jean), de transcrire toutes ses paroles. Le texte obtenu est ensuite lu à la communauté chrétienne de l'île, qui conservera un exemplaire du texte.

Du point de vue historique, c'est plus compliqué de trouver des faits. Le despotisme de Domitien est bien connu et les actes d'exil ne manquent pas dans sa biographie ; c'est lui qui chasse les philosophes de Rome, si je me rappelle bien. 

L'érémitisme (nom à rapprocher d'ermite, venant du grec eremos, désert) est également bien attesté dans les tout premiers siècles du christianisme.

Par ailleurs, la littérature apocalyptique (Apocalypse = révélation) est un genre bien connu dans la Bible ; les livres d'Ezechiel et de Zacharie s'y rattachent et celui de Daniel est établi comme un chef-d’œuvre du genre.

Il est tout à fait possible que le texte ait bien été écrit à la fin du Ier siècle, dans les circonstances exposées selon la tradition.

Les historiens mettent cependant en doute la fusion entre Jean l'apôtre, le fils de Zébédée, et Jean l'auteur de L'Apocalypse ; même l'évangéliste pourrait être une troisième personne. La biographie de l'écrivain (qui se nomme lui-même Jean dans le texte, il n'y a pas de doute, pour autant qu'il n'y ait pas eu de remaniements) est loin d'être certaine et la persécution de Domitien envers les chrétiens pourrait avoir été amplifiée par la propagande. Quoi qu'il en soit, Patmos n'était pas un lieu d'exil de la part de l'empereur.

La datation pose problème : un texte écrit à l'époque de Domitien ou à celle de Néron ?

De toute façon, il s'agit d'un lieu vénéré depuis des siècles et c'est peut-être sa dimension importante lors de la visite, et qui en a fait un site estampillé UNESCO.


Je m'attendais à une grotte plus profonde, alors qu'il s'agit davantage d'un abri auquel s'est accolé le monastère. Plusieurs icônes s'attachent logiquement aux personnages principaux de l'écriture, Jean et Prochore. Cette tradition iconographique est née au XIVe siècle et s'est répandue ensuite. J'aimerais bien connaître les indices pour identifier clairement ces personnages !


L'ensemble rappelle fortement une église orthodoxe, et l'iconostase assez sobre, malgré la croix volumineuse qui touche la voûte, accentue cette impression.

Il paraît que le lieu, objet de pèlerinage depuis des siècles, peut être envahi de fidèles et de touristes. J'ai la chance de m'y trouver avec très peu de monde, dans un certain silence respectueux.

J'attends cette visite depuis que j'ai travaillé L'Apocalypse, en cours de littérature comparée à l'université, et je suis venu à Patmos tout exprès. Je ne peux dire que je suis déçu mais je ressors avec des sentiments mêlés.

4 commentaires:

  1. Visite intéressante d'un lieu majeur. Votre article récapitule clairement les problèmes, entre tradition et fait historique.
    Merci.
    Wolfgang

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