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samedi 3 août 2019

Tottori : Jinpukaku


Sommes-nous bien au Japon ? Par quel miracle une semblable villa a-t-elle été construite à Tottori ? Je veux en savoir plus !


L'extérieur



Le Jinpukaku est un palais de style européen à deux niveaux, en bois, avec une toiture qui hésite entre Renaissance et Baroque.


On remarque à droite une tour coiffée d'un toit pointu, c'est là que se trouve l'escalier en colimaçon visible de l'intérieur.


L'entrée est protégée d'un porche à colonnes, qui fait grand style !



Une pelouse à l'anglaise galonne le palais, selon la mode de l'époque qui insérait des éléments européens dans le paysage (comme je l'ai vu ces jours-ci à Hibiya, par exemple).


La grande maison de bois avec des colonnes pourrait aussi évoquer les constructions en Louisiane.


Au fond, on a tout de même aménagé un indispensable plan d'eau pour créer un petit jardin japonais.



Tout de suite, ça a davantage de charme !



Le symbole étoilé se retrouve un peu partout et on le repère dès le tour extérieur de la maison.


En grimpant vers le château, j'en ai profité pour photographier d'un peu plus haut, et sans drone ! On mesure bien combien il s'agit d'un îlot préservé.



On voit cinq des six cheminées en brique. La chaleur suffocante lors de ma visite fait douter de leur emploi, mais la rigueur des hivers pouvait rendre indispensable ce moyen "moderne" de chauffage. Un pur élément occidental, en tout cas.

Je fais répéter l'aimable guichetière hors d'âge pour vérifier que ce n'est pas une erreur : 150 yens ! Un euro quarante ! Pour visiter un palais ?

Chez nous, à multiplier par dix, sans aucun doute.

L'intérieur


Le vaste hall donne sur un ensemble de pièces ;  au rez-de-chaussée, elles sont essentiellement utilitaires (bureau, réserve, mais aussi garde-robe et salle de bains).


Le palais fut construit en 1906 et fut immédiatement utilisé pour héberger le Prince héritier, le futur empereur Taisho, lors de sa visite en 1907.


Il servit ensuite de salle municipale, de salon d'honneur pour les réceptions, avant de devenir musée de sciences.


En 1973, on décida de le faire visiter comme lieu historique et il fut abondamment restauré. Je pense qu'une nouvelle campagne ne serait pas inutile, la peinture extérieure s’effrite à certains endroits  et certains papiers peints sont souillés par l'humidité.



C'est Nakahiro Ikeda, daimyo de Tottori, qui souhaita un palais dans le nouveau style, qui puisse rivaliser avec les constructions européennes. Il conclut le contrat avec Tohkuma Katayama, architecte en chef de l'Agence de la Maison Impériale.



Josiah Conder, un architecte britannique, avait été engagé pour former les élèves de l'école d'architecture de Tokyo et Takayama avait été un de ceux de la première promotion.



Takayama s'était rendu célèbre par l'édification du palais d'Asakasa à Tokyo, considéré comme la plus somptueuse réalisation à l'européenne durant toute l'ère Meiji.




Katayama construisit aussi le Musée National de Kyoto et nombre de bâtiments officiels.


Une série de photos d'époque décrivent ce Japon en plein bouleversement, qui hésite entre Orient et Occident mais conserve un monde rural traditionnel.







Le palais est resté dans son jus ; les fameuses cheminées, les boiseries, les papiers peints sont ceux des débuts.







L'escalier en colimaçon était utilisé pour le service. C'est donc lui qui occupe la tour de droite.


Quand je parlais des taches sur le papier peint !


Chaque pièce était tapissée d'un papier différent. Peut-être plus encore que tout le reste, cette idée de couvrir les murs était la signature d'un style occidental, même si les Hollandais en avaient déjà collé dans  leurs maisons de Dejima.



Le couloir vaste mais solennel avec ses colonnes grecques donnait sur des pièces de réception, salle d'audience ou salle à manger.


Le seul élément japonais, c'est la calligraphie "Jinpukaku " sur le mur. Les lustres d'époque rappellent que ce fut ici qu'on amena pour la première fois la lumière électrique dans la région.



Les toilettes, modèle basique : une boîte percée d'un ovale et un tiroir pour l'évacuation des matières !


La chambre est au croisement des cultures : cheminée européenne, pas de lit mais des tatamis pour dérouler son futon.


On voit bien que le style ne renvoie pas à l'Art Nouveau ni à l'Art Déco (comme le Palais du Prince Asaka à Tokyo) ; c'est encore le XIXe victorien qui s'impose, et ce salon aurait pu être photographié à New-York où ce style dura longtemps et s'imposa comme une référence.




La galerie couverte gratifie le visiteur qui réussit à supporter la chaleur asphyxiante par une vue de verdure. Enfin, ce n'est pas complètement le cas aujourd'hui.



Pour la salle à manger, on fit venir tout exprès des tapis d'Angleterre.



Une série sur l'empereur Taisho fut notamment tournée ici, et les images exposées donnent un peu de vie à ce palais vide.





Version Lego.





Quand il neige au Japon, ce n'est pas rien !

Ce n'est pas une visite absolument indispensable pour un premier voyage au Japon mais ce palais dégage un certain charme suranné. J'espère qu'il sera restauré avant que les dégradations ne deviennent irréparables.

1 commentaire:

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