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lundi 25 février 2019

Washington : Peintres américains à la National Gallery (aile est)


Je reste tout de même dans le quartier après mes visites du Capitole et de la Bibliothèque du Congrès.
Je ne vais pas avoir énormément de temps pour tout visiter mais, en deux demi-journées, j'escompte bien voir le gros des collections de la National Gallery of Art. Pour les autres musées, il me faudra revenir.



Sans trop de préméditation, je commence par l'aile est, la plus récente. Ce projet de l'architecte Ieoh Ming Pei date de 1978 et il conserve un aspect moderne avec ses lignes épurées. C'est, logiquement, celui qui renferme les collections des XXe et XXIe siècle.

Max Ernst, Capricorne
 Dès l'entrée dans ce musée gratuit, nous sommes accueillis par une famille dans une sculpture de Max Ernst. Je pensais à Picasso mais ce n'est pas bien loin.


La collection de mobiles de Calder est célèbre et là aussi, nous trouvons un avant-goût.


Les salles mélangent allègrement les artistes, les origines, dispersent parfois le même sur plusieurs salles. Pour plus de commodité, je propose un petit classement des œuvres qui m'ont paru le plus caractéristique.

Pour la peinture européenne, il faudra attendre l'article suivant.

De Edward Hopper à Georgia O'Keefe


Edward Hopper, Ground Swell, 1939

Parmi les artistes du début du XXe siècle, Edward Hopper tient une place à part. C'est un peintre qui sait capter l'instant et on a souvent relevé chez lui la nostalgie d'un monde en train de disparaître. Un artiste dont les œuvres sont rarement exposées et je profite de chacune.

Edward Hopper, Cape Cod Evening, 1939

George Bellows, 42 Kids, 1907

 George Bellows fut élève de Robert Henri et ses peintures de combats de boxe ont assuré sa célébrité. J'ai choisi plutôt quelques toiles sociales. Comme ses collègues de la Ash Can School, il a souvent représenté des scènes urbaines réalistes, comme un témoin de son temps.

George Bellows, Blue morning, 1909

George Bellows, The lone Tenement, 1909

Robert Henri, Snow in New York, 1902

 Grande figure de la peinture réaliste, membre aussi de la Ash Can School, Robert Henri fut très intéressé par le mouvement anarchiste. Ce professeur influent forma, outre Bellows déjà mentionné, Man Ray ou Trotski qui étudia la peinture à New York.

Marsden Hartley, Mount Katahdin, Maine, 1942

 Bientôt le réalisme cède le pas à de nouvelles figurations. Marsden Hartley peignit souvent le Maine en essayant de développer un art régional qui s'inscrive dans des représentations multiples de la nation. Il est souvent rattaché au modernisme.

Aaron Douglas, The Judgement Day, 1939

Le peintre noir Aaron Douglas fut une figure majeure de la Harlem Renaissance. Son art où la géométrie et l'harmonie colorée tiennent une large place influença nombre de peintres.

Patrick Henry Bruce, Peinture / Nature morte, 1924

Quoique méconnu en Europe, le cubiste Patrick Henry Bruce est aussi un jalon important. On voit facilement comment son œuvre colorée put influencer Fernand Léger ou les Delaunay. Il suivit les cours de Matisse et on pense qu'en retour, il inspira son ancien professeur.

Arthur Dove, Space divided by line motive, 1943

Tonique association de couleurs chez Arthur Dove, ce pionnier de la peinture abstraite.

Georgia O'Keeffe, Jack-in-the Pulpit n°2, 1930

 Georgia O'Keeffe est une artiste passionnante dont la vie est un vrai roman, entre allergie à la térébenthine et dépressions. Sans cesse en quête de voies nouvelles, son œuvre moderniste est un pilier du XXe siècle.

Georgia O'Keeffe, A blackbird with snow-covered red hills, 1940

Norman Lewis, Untitled,1946

Avec Norman Lewis, place au graphisme monochrome, où la liberté du trait et l'utilisation de l'espace sont de nouvelles voies d'expression.

Jackson Pollock, Untitled, 1945/1946

Parallèlement, Jackson Pollock, réputé pour son expressionnisme abstrait, mène des recherches sur le dripping (la partie la plus connue de son œuvre). On mesure aisément la différence avec Lewis alors que le principe reste identique.

Mark Tobey, New York, 1944

Mark Tobey avait été formé avec les arts asiatiques, la peinture chinoise à l'encre et la calligraphie. Ici, il s'agit d'une peinture à la tempera, mais c'est intéressant de voir comment son utilisation du trait diffère encore des deux précédents artistes, pourtant contemporains.

Lyonel Feininger, Street of Barns, 1914

 Au début du siècle, le cubisme était né sous les doigts de Braque et rapidement développé. Quelques années après, Feininger s'en empare.

Expérimentations : les années 1960


Cy Twombly, Untitled (Bolsena), 1969

 J'ai parlé récemment de Twombly à propos de son rideau de l'Opéra Bastille, de retour pour Les Troyens. Cette toile est typique de ses travaux des années 1960, avec une exploration approfondie des possibilités du trait, de l'écriture, du crayonné…

Charles Ross, Hanging Islands, 1966 (refabriqué en 2015)

 Les années 1960 voient aussi débouler les installations, une occupation différente de l'espace avec parfois du mouvement. Charles Ross se rendit célèbre avec celle-ci, composée de six série de six prismes de largeur à chaque fois doublée, qui produisent des effets lumineux différents selon la position du spectateur. Ross, fasciné par la perception et le mouvement, réalisa aussi des performances avec des danseurs et chorégraphes.

Al Loving, Brownie, Sunny, Dave an Al, 1972
 Al Loving était un peintre noir, expressionniste abstrait, qui fit beaucoup pour la cause de ses collègues. Dans les années 1960, il réalisa beaucoup d'œuvres autour du carré. A partir de sa visite d'une exposition au Whitney Museum autour du quilt, il s'intéressa de près au tissu dont il explora les opportunités. Il se qualifiait lui-même d'"expressionniste matériel".
Salvatore Scarpitta, Harpoon Rack II, 1960

 Salvatore Scarpitta était le fils d'un sculpteur sicilien émigré à New York. Il fit cependant de nombreux aller-retour entre les USA et l'Europe, où il travailla longtemps à Rome. Ses sculptures travaillant sur le mouvement sont ses réalisations les plus célèbres mais ici, il s'agit davantage d'une exploration du volume et de la lumière.

Eva Hesse, Test Piece for "Contingent", 1969
 Eva Hesse mourut à trente-quatre ans, mais auparavant, elle avait exploré les possibilités des matériaux et des structures, en expérimentant sans cesse. Je connais surtout ses installations, mais ici, cette pièce impalpable est faite de gaze imprégnée de latex.

Robert Ryman, Untitled, 1961

Une des grandes figures du minimalisme. Robert Ryman  mena des recherches radicales sur le monochrome. Cela me rappelle toujours Art, la pièce de Yasmina Reza.

Franck Stella, Rowley, 1962

 Vigueur de la couleur dans les travaux de Franck Stella, un artiste souvent conceptuel qui remet sur la planche,  à distance, l'héritage de Mondrian.

Andy Warhol, A Boy for Meg, 1962

Andy Warhol est sans doute un des peintres américains les plus connus en Europe, où des expositions évoquent régulièrement son œuvre. Version pop art, on connaît ses boîtes de soupes Campbell ou ses sérigraphies répétant le même dessin. Le New York Post fut aussi une source d'inspiration.

Roy Lichtenstein, Look Mickey, 1961

 L'autre grande figure du pop art, c'est Roy Lichstenstein, dont une large exposition au Centre Pompidou m'avait permis de découvrir l'étendue du talent. Les images populaires, la publicité ou, comme ici, les comics, ces bandes dessinées américaines, sont ses principales sources d'inspiration.

Vija Celmins, Pencil, 1966

Je connaissais uniquement les dessins de Vija Celmins, inspirés par la nature, rochers et océans. Très réaliste mais géant, voici un crayon graphite d'un nouveau genre.

Jasper Johns, Flag I, 1973

 Entre dada et expressionniste abstrait, Jasper Johns s'illustra aussi dans le pop art avec ses fameux drapeaux américains, retravaillés, repeints. Je pense que c'est ce qui est le plus connu de cet artiste.

Gene Davis, Black Popcorn, 1965
 Gene Davis, c'est un peu une version américaine et colorée de Buren. Son truc, ce sont les rayures verticales, qui créent toujours de séduisantes associations de couleurs. Il eut l'idée de peindre ses rayures dans les rues (je crois que ce fut alors la plus grande peinture au monde, dans les années 1970) et ce fut très largement repris. D'ailleurs on voit de temps en temps des rejetons de ses travaux.
Ses peintures étaient très minutieusement et longuement préparées, en testant avec des bandes découpées les capacités offertes par les associations. Tout le contraire d'un art facile qu'on pourrait imaginer.

Jackson Pollock, Number 1, 1950, Lavender Mist, 1950
 La face la plus célèbre de Pollock, la voilà ici. Un peintre torturé, sans cesse en recherche, qui ne connut que très tardivement la reconnaissance. Cette œuvre fut peinte dans son studio de Long Island en utilisant une toile au sol et en versant de la peinture pour les murs, puis en la retravaillant avec des brosses. Comme un artiste pariétal, Pollock signa la toile avec ses empreintes.

Mark Rothko et Barnett Newman


Mark Rothko, Sacrificial Moment, 1945

Rothko était un homme très fin, extrêmement cultivé, grand lecteur de Nietzche. Il chercha sa voie dans différentes écoles, et cette peinture (pour moi inconnue) témoigne de cette période.

Il passa un temps au milieu du surréalisme, de l'expressionnisme abstrait et de l'action painting avant d'élaborer son propre style : sur de grandes toiles présentées en portrait, deux couleurs sont disposées dans des champs aux contours flous.


Toutes ces toiles sont baptisées Untitled, inutile donc que je les légende.
On pourrait croire qu'il s'agit de recherche sur la couleur, comme le faisait le précédent Gene Davis par exemple. En fait, c'est une peinture spirituelle qui tente de dépeindre l'inconscient, puissamment influencée par Freud (son Interprétation des rêves en particulier) et Jung.




Barnett Newman, The Stations of the Cross, années 1950-1960
 Proche de Rothko, Barnett Newman mena à moment donné des recherches proches, ce que l'on voit ici. Il est surtout connu pour le Colorfield Painting, mouvement contraire à l'Action Painting.

Barnett Newman, Achilles, 1952


Ad Reinhardt, Untitled (Red and Grey / Yellow and White), 1950

Je ne connaissais pas ce peintre, pourtant une figure majeure de l'expressionnisme abstrait, qui exerça une influence importante dans le minimalisme et la peinture monochrome.

Il écrivit également de nombreux textes conceptuels, réunis dans un volume, Art as Art.


Par la fenêtre, surprise ! Un demi-Capitole.


Alexander Calder



On ignore parfois que c'est Alexander Calder qui inventa le mobile, une association de formes suspendues dans les airs, et que c'est Marcel Duchamp qui lui donna ce nom.

Bien avant les mobiles pour berceau et ceux pour chambre d'enfant !


Calder vécut à Paris dans les années 1920-1930 et les rencontres dans la capitale, alors un fécond creuset artistique, agirent profondément sur son œuvre.


Artiste incroyablement doué, il se manifesta dans les domaines les plus divers, ne négligeant pas de travailler les arts appliqués (ses bijoux, ses assiettes sont célèbres) et même pour l'industrie (BMW par exemple).



Même si on n'a aucune culture artistique, on est généralement attiré par cet art joyeux, impertinent, toujours séduisant. Et ses mobiles réussissent à évoquer très simplement liberté et mouvement.

10 commentaires:

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    Annie

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  2. Une visite dans des collections fabuleuses où figurent tous les grands noms de la peinture américaine. Vos photos sont excellentes et les petits textes renseignent utilement sur le contexte artistique.
    Magnifique !
    Pierre

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    1. Et vous vous doutez bien que je n'ai pas reproduit ici toutes mes photos !
      Effectivement, ce sont là des collections extraordinaires.
      Merci beaucoup, Pierre.

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  3. Great post about american art,with fine highlights of the collections.
    Gene

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    Yurij

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