Toulouse : Exposition Île de Pâques au Museum

Allée du Muséum de Toulouse

Dès l'entrée, un majestueux Moai, une de ces mystérieuses statues venues de l'Île de Pâques, annonce la couleur.

Un Moai avec sa coiffe

En ce mois de décembre 2018, le vénérable Muséum accueille effectivement une exposition sur une des plus célèbres îles du monde, celle de Pâques. Ses énigmatiques statues ont assuré depuis longtemps sa renommée ; pourtant c'est assez rare de voir une exposition qui lui soit consacrée.



C'est une curieuse coïncidence, quelques jours après ma visite de l'exposition sur une autre île lointaine, Madagascar. Et je n'ai posé le pied sur aucune des deux…

L'Île de Pâques, un filon pour la BD

Le Moai est, à chaque fois, l'élément distinctif pour identifier en un clin d'œil l'île. Mais elle est bien plus rarement nommée sur les couvertures.

 Les origines

Maquette d'embarcation des premiers Polynésiens

Comme beaucoup d'îles de cette partie du globe, celle-ci fut peuplée tardivement, vers l'an mil, par de valeureux navigateurs originaires d'Asie. Les bateaux, ancêtres des catamarans, étaient prévus pour de longues traversées et embarquaient le nécessaire à la colonisation, notamment graines et animaux.

Reconstitution de la vie sur le bateau vers l'Île de Pâques

Etablis en Polynésie, les insulaires montaient à leur tour des expéditions pour étendre leur colonisation. Leurs connaissances nautiques et techniques en assuraient le succès.

Poro (galet de basalte) avec des gravures de dauphins

Les pilotes complétaient l'observation des étoiles, des phénomènes de houle et des courants par le repérage des vols d'oiseaux, les végétaux. Une véritable science de la navigation nautique.

Les premiers voyageurs européens

William Hodges, Les moai sur l'Île de Pâques

 James Cook fut le premier, en 1774. Grâce au peintre de l'expédition, William Hodges, on peut se faire une idée de l'île à l'époque. J'avais vu jadis, au Maritime Museum de Greenwich, une exposition sur l'expédition de Cook et le reportage pictural de Hodges montrait bien son émerveillement devant ces terres inconnues.

Gravure, Insulaires et Monuments de l'Île de Pâques

Si Cook ne passa que trois jours sur l'île, en 1786 l'albigeois Jean-François de Galaup de Lapérouse organisa deux expéditions fort bien documentées, laissant de précieux témoignages.

Le voyage de Pierre Loti

Pierre Loti, Procession vers les Moai

 Julien Viaud n'avait pas encore opté pour le pseudonyme de Pierre Loti lorsque, jeune aspirant officier, il atteignit en 1872 l'île à bord du Flore. On n'oublie pas que le brillant écrivain de récits exotiques (Pêcheurs d'Islande ou Madame Chrysanthème, le roman à l'origine de Madama Butterfly) avait un sacré coup de crayon.

Pierre Loti, Moai sur l'Île de Pâques

Pierre Loti, Moai sur l'Île de Pâques

Précision de documentariste, qui présente les deux faces de la statue. Sans doute un élève bien formé dans ses cours de dessin !

Pierre Loti, Dessin, Entrée à la case du vieux chef

Fascination pour cette bien étrange case où il faut ramper pour y avoir accès.

Reconstitution de la cabine de Pierre Loti

Reconstitution de la cabine de Pierre Loti

Pierre Loti, deux dessins de sa cabine

Journal de Pierre Loti

Pierre Loti au moment de son voyage

 Les Moai

Moai de l'Île de Pâques

Le mot moai désigne une statue représentant une figure humaine. Sur l'île furent érigés environ neuf cents moai en pierre, de taille très diverse (de un à six mètres pour la plupart), en utilisant les matériaux locaux, tuf et basalte essentiellement. Les plus grands, dépassant dix mètres, sont restés dans les carrières.

Moai de l'Île de Pâques

 Les rois pascuans étaient protégés par le mana, une puissance surnaturelle, complétée par le tapu, une série d'interdits qui régissaient la vie quotidienne. J'apprends avec stupeur que c'est ce mot pascuan qui a donné le français tabou !

Reconstitution du transport des Moai de l'Île de Pâques

 Comme pour les pyramides, le transport de ces statues parfois gigantesques a donné lieu à de multiples hypothèses, parfois des élucubrations. Les scientifiques penchent aujourd'hui pour l'utilisation de traîneaux.

Reconstitution de l'érection des Moai de l'Île de Pâques

Reconstitution du transport des Moai de l'Île de Pâques

Les Moai étaient érigés sur des ahu, des tribunes à degrés. On retrouve l'idée de la statue sur socle, une base de notre culture religieuse.

Ils étaient orientés vers l'intérieur de l'île afin de s'adresser directement aux habitants.

Eléments de l'œil d'un Moai

Les cavités oculaires n'étaient pas vides comme aujourd'hui. On y plaçait un œil et une pupille. Je me rappelle  une séance dans mon enfance de Connaissance du Monde où Christian Zuber présentait son voyage et montrait l'archéologue qui avait reconstitué ces yeux pour la première fois.

Détail d'un pétroglyphe, Île de Pâques

 Les pétroglyphes (pierres gravées) sont nombreux sur l'île, et présentent souvent des animaux marins.

Détail d'un pétroglyphe, Île de Pâques

Figure anthropomorphe, Île de Pâques

Certains des Moai sont sculptés en bois de toromiro, aujourd'hui disparu de l'île.

Figure anthropomorphe, Île de Pâques

Figure anthropomorphe, Île de Pâques

Figure anthropomorphe, Île de Pâques

Pectoral, Île de Pâques

Racine de toromiro

 Le toromiro, une variété de sophora,  était l'arbre favori des sculpteurs : un bois imputrescible, dur, d'un beau grain. Son utilisation intensive a provoqué sa disparition.

Un exemplaire de Sophora toromiro.

Quelques exemplaires ont été transportés dans des jardins botaniques et l'espèce n'a pas disparu, mais on ne parvient plus à le réimplanter in situ.

Pierre gravée de caractères, Île de Pâques

 L'écriture des pascuans, voilà la vraie énigme à résoudre.

L'homme-oiseau

Manutara, l'oiseau migrateur

Dans la religion pascuane, on vénère le dieu Makemake et son envoyé terrestre, Tangata manu, l'homme oiseau.

Crâne gravé, Île de Pâques

Le Tangata manu était désigné lors d'une compétition. Il fallait gagner à la nage une autre île et revenir avec un œuf de l'oiseau manutara sans le casser.

La fonction exacte du Tangata manu semble sujette à de multiples hypothèses.

Moai, Île de Pâques

Transport d'un Moai, Île de Pâques

Reconstitution d'un paysage de l'Île de Pâques à l'arrivée des colons

Autrefois, l'île était un territoire boisé, consciencieusement détruit par l'implantation humaine. Ce n'est pas l'abattage du toromiro qui en est la cause, comme je le croyais tout d'abord.

Les moutons sur l'Île de Pâques

Mais on amena sur l'île de nombreux troupeaux de moutons pour en faire l'élevage. Outre que cela ne profita pas aux habitants, parqués dans des villages (dans des conditions de vie misérable), les ovins s'appliquèrent à faire disparaître la végétation. Apparemment on déforesta aussi pour étendre les zones de pâturages.

Souvenirs à l'effigie des Moai, Île de Pâques

Quelques souvenirs qu'on peut acheter sur l'île. Qui veut son petit Moai en résine ?

Ce n'est pas une énorme exposition mais elle est bien construite et apporte de nombreuses informations claires. J'ai eu la chance de profiter d'une visite guidée claire et pédagogique, qui m'a apporté une foule de renseignements dans lesquels j'ai pioché sans vergogne pour cet article.