Une intéressante représentation de Macbeth de Verdi avec l'Opéra National de Prague, avec Anton Keremidtchiev et Anda-Louise Bogza.
Me voici de retour dans cette spectaculaire salle du Narodni Divadlo, le Théâtre National, où la troupe de l'Opéra se replie en attendant la fin des travaux.
Ce soir, Macbeth, un joyau du répertoire verdien, adapté de l'œuvre de Shakespeare. C'est d'ailleurs une adaptation bien faite, qui réduit considérablement le nombre de personnages pour centrer l'action sur le couple fatal. Verdi en a composé un remarquable opéra, avec de grandes scènes (le banquet) qui contrastent avec des chœurs expressifs (les sorcières) et des scènes intimistes.
C'est mon deuxième de l'année, après celui de Lyon.
La production de Martin Čičvák
Je fais toujours un peu la moue devant des costumes qui mélangent les époques (fraises et tenues contemporaines) et certaines scènes manquent de cohérence, mais, hormis cela, la mise en scène de Martin Čičvák ne manque pas d'intérêt et trouve souvent des solutions ingénieuses.
Le plateau est nu, hormis deux rambardes et une sorte d'énorme rocher qui descend lentement tout au long de la représentation. D'ailleurs, il demeure présent à la dernière scène, signe que les choses ne s'arrangeront guère avec le nouveau roi.
Tout est noir, très noir même, hormis les capes claires des enfants masqués qui apparaissent devant Macbeth. Il faut dire que le livret est un voyage dans l'horreur comme on en voit rarement.
Les sorcières sont gérées intelligemment, avec parfois un peu de ridicule (leur chorégraphie disco était-elle bien nécessaire ?) mais avec un vrai sens du groupe. Moins inquiétantes que souvent, surtout face au couple démoniaque.
Le Macduff bravache est vu comme un matamore sans conséquence, alors que Banco présentait une vraie noblesse. Le couple Macbeth est bien au centre de l'action, se soutenant tout en s'enfonçant dans le drame, et la foule assiste, impuissante, à son évolution. Très inquiétante scène de la folie où le Médecin prend des notes sans chercher à améliorer la situation.
Une représentation riche en images évocatrices, avec beaucoup d'idées. Par exemple, sur les dernières notes de l'opéra, on voit Macbeth se relever et empoigner le nouveau roi !
La distribution du soir
Dans la foule des seconds rôles de cet opéra, on remarque les apparitions (Alexander Laptev, Gabriela Pesinova, Lubomira Alabozova) de très bonne tenue.
Lucie Hájková, |
La Dame de Lucie Hajkova côtoie l'excellent Médecin de Ivo Hrachovec, le Basilio de l'an dernier.
Václav Sibera, Jaroslav Březina |
Les deux ténors montrent des voix contrastées : voix bien projetée, mais aigu rugueux de Vaclav Sibera (Malcolm), et émission aussi peu verdienne que le style pour le Macduff de Jaroslav Brezina, qui n'est visiblement pas ici dans son meilleur emploi.
De même, je ne suis guère enthousiasmé par l'honnête Banco de Roman Vocel, qui affiche une voix claire et une interprétation assez lisse. C'est visiblement dans d'autres rôles qu'on peut profiter de ses talents.
Anda-Louise Bogza et Anton Keremidtchiev |
Heureusement le couple maudit offre d'autres satisfactions. Anda-Louise Bogza, deux jours après son Amelia, montre ses qualités de styliste et sa probité musicale dans une Lady affrontée avec beaucoup de franchise et gérée avec intelligence. Elle ne gaspille pas sa voix dans les aigus de la première partie, pour mieux offrir un registre grave bien soudé et une mémorable scène du somnambulisme. Vraiment une belle interprète, engagée, intelligente.
Anda-Louise Bogza et Anton Keremidtchiev |
Le rôle-titre est tenu par Anton Keremidtchiev, un baryton bulgare que je n'ai entendu qu'une fois, en Telramund à l'Opéra de Toulon aux côtés de Stefan Vinke et Ricarda Merbeth.
Sa fréquentation du répertoire wagnérien ne l'empêche pas de proposer un excellent Macbeth, joué avec nuance ; il déploie une riche palette de couleurs et un style très soigné qui profite à un Pietà Rispetto splendide. Je dois avouer que je ne m'attendais pas à tant, et c'est une très bonne surprise.
Jiří Štrunc, Anda-Louise Bogza |
Le chef Jiří Štrunc dirige un peu tous les répertoires dans la maison, et c'est un bon chef qui veille au grain, rattrape des trombones partis trop tôt pour éviter les décalages sur le plateau, crée le dramatisme dans son orchestre sans exagérer les contrastes. Une direction très vivante d'un excellent technicien, et c'est déjà énorme.
Anda-Louise Bogza et Anton Keremidtchiev |
Lucie Hájková |
Jaroslav Březina |
Ivo Hrachovec |
Jiří Štrunc |
Gabriela Pešinová |
Anton Keremidtchiev |
Anda-Louise Bogza |
Grande chanteuse, grande dame, et avec un cœur "gros comme ça". Encore une fois un immense merci !
A great post, thanks for this clever text.
RépondreSupprimerAnnie
Thank you Annie ! It is still a great pleasure to read your warmest comments.
RépondreSupprimerSorry for my late message !
Un peu inégal à vous lire…
RépondreSupprimerMais comme toujours, votre vivant article donne un peu l'impression d'y avoir été !
Pierre
Encore un grand merci pour vos commentaires toujours chaleureux, Pierre !
SupprimerGreat post on a very special topic. Interesting to understand this opera. I love your design!
RépondreSupprimerIgor
Thanks Igor, it is very kind!
SupprimerLe théâtre où est donné Macbeth est magnifique. Dans cette mise en scène le noir domine... ce n'est pas une comédie il est vrai. Tu penses que l'on peut voir de meilleures représentations, mais tu sais mettre en valeur les qualités de celle-ci. Toujours de fines remarques qui montrent ta grande connaissance de l'opéra.
RépondreSupprimerJe passe de très bons moments à te lire et à admirer les photos.
Merci. Bises. Mam
Devant de tels compliments, je rougis...
SupprimerUn grand merci une fois encore !