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dimanche 8 avril 2018

Paris : Benvenuto Cellini à l'Opéra Bastille




Je pense que le dernier Benvenuto Cellini à Bastille, c'était dans les années 1990, avec l'inoubliable Chris Merritt dans le rôle-titre. Il était temps que ce chef-d'œuvre de Berlioz revienne sur la scène de l'Opéra de Paris.



J'aime beaucoup cette œuvre si variée, avec des pages sublimes (les deux airs de ténor notamment), des scènes comiques réussies des chœurs puissants, une écriture toujours inventive. Plus l'orchestration, qualité Berlioz, en prime.

Beaucoup de mes amis amateurs d'opéra méprisent cet opéra, je continue à faire campagne... Ce serait bien qu'il soit donné un peu plus souvent en France ; c'est à l'étranger que j'ai eu le plus d'occasions de le voir.

La production de Terry Gilliam

Comme beaucoup, j'ai vivement apprécié les Monty Python et leur satire souvent hénaurme, et j'avais vu la production à Londres de La Damnation de Faust de Terry Gilliam, un membre fameux du groupe, réputé notamment pour ses films  Brazil ou Les Aventures du Baron Munchausen.
J'étais très curieux de découvrir ce que ce monsieur avait à proposer dans Benvenuto Cellini.

Certains de mes amis m'avaient prévenu d'une mise en scène excessive. Je l'ai trouvée extrêmement réussie, plutôt classique dans sa gestion de la scène. Les grands passages de foule sont très bien construits, et le carnaval qui déborde dans la salle correspond bien à une des tonalités de l'œuvre. Les scènes comiques fonctionnent bien et l'isolement visuel de Cellini dans son air Sur les monts les plus sauvages est tout aussi réussi. L'ingénieux décor à transformations (spécial changements rapides), qui évoque Piranese, est utilisé à fond.

Philippe Jordan et ses chœurs et orchestre


Benvenuto Cellini,   c'est un opéra de chef. Il faut quelqu'un à la manœuvre pour gérer la complexité de l'écriture berliozienne, s'occuper avec précision des innombrables entrées musicales sur le plateau, et faire ressortir les finesses de l'orchestration. Philippe Jordan est, à nouveau, l'homme de la situation, avec sa lecture transparente qui valorise les différences de plan. On mesure bien la différence entre son orchestre et celui de Kaunas dans le CD de John Osborn, par exemple.
Quant aux forces maison, c'est l'excellence comme toujours. Un orchestre virtuose et des chœurs vigoureux qui font de l'Honneur aux maîtres ciseleurs un  des grands moments de la soirée. 

La distribution

 

Excellente troupe de comprimari, Se-Jin Hwang (le Cabaretier), Vincent Delhoume (Francesco), Luc Bertin-Hugault (Bernardino) et Pompeo (Rodolphe Briand), aux voix bien projetées et à la diction impeccable. Mention spéciale aux deux derniers.

Marco Spotti chante le Pape Clément VII avec la touche juste dans la composition et une voix sonore.
Maurizio Muraro est un Balducci dans la tradition bouffe, malheureusement sa voix est parfois un peu étouffée ce soir. Belle composition théâtrale cependant d’un très sympathique artiste.
L'Ascanio de Michèle Losier est un bonheur avec son timbre coloré, et elle fait vraiment exister le personnage. Son air, vivant et vraiment interprété, est particulièrement réussi.
J'ai beaucoup aimé le Fieramosca d'Audun Iversen, très justement composé (comique, parfois ridicule, jamais caricatural), chanté avec variété et beaucoup d'harmoniques. J'avais apprécié son Oniegin, et j'aimerais bien le retrouver dans un autre rôle.

Je n'ai entendu qu'une fois Pretty Yende, en Comtesse Adele du Comte Ory. Elle se tirait avec brio du rôle, même si je n'étais pas fan de son timbre à la Kathleen Battle. Sa Teresa est fort honorable, mais, ce soir,  j'aurais aimé plus de diversité dans les couleurs et de projection dans la voix.

J'ai toujours entendu John Osborn excellent dans des rôles divers, dans l'Otello de Rossini, Semiramide, Guillaume Tell, La Donna del Lago au Met ou plus récemment en éblouissant Jean de Leyde dans Le Prophète à Toulouse. Son air Sur les monts les plus sauvages sur son récital en CD était extrêmement prometteur, comme je l'ai écrit.

Le rôle entier est ravageur, hérissé de difficultés techniques, avec des aigus multiples à émettre différemment. Rôle long,  exigeant en souffle par ailleurs.

John nous offre un véritable festival. La perfection technique, la longueur de la voix, la qualité du français, la sûreté du phrasé... On ne sait que mettre en avant. Et cette collection d'atouts est au service d'une musicalité exceptionnelle (quelle palette de couleurs, quelle beauté dans les phrasés !) et d'une interprétation convaincante de bout en bout. Les pianis sur les aigus sont miraculeux...
Vrai talent de comédien, en plus !

 Le répertoire français a de belles heures à venir avec un tel héraut.

Merci mille fois, cher John. Ces soirées-là assurent des souvenirs pour une vie entière.

Marco Spotti à gauche.

Philippe Jordan

Le chef des chœurs José Luis Basso.

Rodolphe Briand.

Audun Iversen.

Michèle Losier.

Marco Spotti.

Pretty Yende.

Luc Bertin-Hugault.

Lynette Tapia et son mari, John Osborn

Maurizio Muraro
  


6 commentaires:

  1. Very complete post. Congrats!
    Annie

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  2. Un bel article, très complet. Vous auriez pu parler davantage de l'oeuvre, qu'en pensez-vous ?
    Ivan

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  3. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Beau spectacle avec un superbe interprète de Benvenuto.
    Marzio

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