New York City : Parsifal, Metropolitan Opera

deuxième acte

J'avais eu la chance de voir cette très intéressante production de François Girard, pleine d'images aussi puissantes qu'inoubliables, tel ce deuxième acte à la scène baignée de sang, lors de la création à Lyon, puis de la reprise au Met en 2013. C'est une production qui offre vraiment de quoi réfléchir, et qui prend à bras-le-corps des problématiques parfois contournées dans les mises en scène : la division hommes-femmes, matérialisée sur scène, l'érotisme et la spiritualité (je pense que c'est de cela qu'il s'agit dans cette production,  plus que de religion), et surtout le thème du bouddhisme, bien connu aujourd'hui par les études sur l'œuvre, mais rarement exposé ainsi sur scène.



Les chœurs sont particulièrement exploités, chorégraphiés tout le long, et ils font vraiment un travail extraordinaire.

En 2013, Jonas Kaufmann y composait un inoubliable Parsifal, pas si éloigné de son Lohengrin.
Le spectacle de 2018 repropose certains chanteurs de l'époque (René Pape, Peter Mattei, Evgeny Nikitin) mais les changements sont de taille, à commencer par le nouveau chef des lieux, Yannick Nezet-Seguin, qui offre une extraordinaire lecture analytique, passionnante de bout en bout. Il est très longuement applaudi et c'est vraiment mérité.

Impeccable équipe de seconds rôles : Karolina Pilou (la voix d’alto solo), Sarah Larsen et Katherine Whyte, Ian Koziara et Scott Scully (les écuyers) Richard Bernstein et Mark Showalter (les chevaliers, bien sonores), Haeran Hong, Deanna Breiwick, Renée Tatum, Dísella Lárusdóttir, Katherine Whyte et Augusta Caso (les filles fleurs, aux voix bien équilibrées), Alfred Walker (Titurel).

troisième acte

Evgeny Nikitin chante donc à nouveau Klingsor, et, malgré la séduction de sa voix, il sait en faire un personnage dangereux et inquiétant. Un des plus beaux interprètes du rôle.

 

René Pape, Peter Mattei

Peter Mattei interprète à nouveau Amfortas, et sa composition demeure aussi saisissante. Bouleversante. Mais vocalement splendide, avec une ligne de chant exemplaire et un legato parfait. Trois interprétations remarquables auxquelles j'assiste en quelques mois, après ses Oniegin et Chiskov (Z Mrtve Ho Domu, De la Maison des Morts) parisiens.

Le Gurnemanz de René Pape n'a plus la même voix de stentor de jadis, c'est indéniable. Cependant la richesse et la profondeur de sa voix, la complexité psychologique du personnage qu'il crée, sont toujours aussi dignes d'admiration. C'est vraiment un interprète majeur des grandes basses wagnériennes (König Marke, König Heinrich, Hermann, Pogner...)

Evelyn Herlitzius, Klaus Florian Vogt

J'adore Evelyn Herlitzius, que je suis assidûment depuis que je l'ai découverte à Bayreuth, dans un Ring au début des années 2000 ! J'ai déjà chroniqué son Elektra ou son Ortrud ici, mais j'ai aussi entendu sa Kundry à plusieurs reprises, notamment au Liceu de Barcelona dans une autre production pénétrante et analytique. Son travail ce soir est à la même hauteur d'excellence, avec la même musicalité au service d'un engagement total. Et une des plus chaleureuses personnes du monde de l'opéra (elle compense l'accueil toujours aussi bourru de René Pape).

Lui aussi découvert en Allemagne, dans un Fidelio au Komische Oper en 2003 (il était presque complètement inconnu alors), Klaus Florian Vogt m'a toujours surpris par la clarté de son timbre et l'émission inhabituelle dans ce répertoire. Outre son Erik, son Lohengrin (le rôle où je l'ai le plus souvent applaudi), son Walther, j'ai aussi vu son Parsifal, également à Barcelona. Le voici donc sur l'immense scène du Met, où il a déjà interprété Lohengrin et Florestan.
C'est un Parsifal très émouvant et engagé, qui exploite totalement la couleur de la voix pour jouer sur la fragilité et l'émotion du personnage. Superbe interprète du rôle.

Evgeny Nikitin, Evelyn Herlitzius

René Pape, Peter Mattei

René Pape

Klaus Florian Vogt

Peter Mattei

Evgeny Nikitin

Yannick Nezet-Seguin

avec  Evelyn Herlitzius