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samedi 31 mars 2018

Lyon : Don Carlos à l'Opéra

Une production intéressante 

Christophe Honoré a signé une production intelligente qui souligne la noirceur de l'œuvre et le poids permanent de la religion. Beaucoup d'idées dans la conception des personnages, du fauteuil roulant d'Eboli (un handicap bien plus visible, théâtralement, qu'un œil aveugle) ou le manteau de Carlos jeté à terre pour qu'Elisabeth puisse s'installer près du feu.

 Il choisit une autre perception que Warlikowski dans sa production parisienne  mais, comme lui, met bien en évidence le conflit entre sphère privée et sphère publique.



Les forces vives

Daniele Rustioni dirige avec beaucoup de souplesse un orchestre méticuleux. Certains décalages dans les chœurs, mais beaucoup d'équilibre scène fosse.
La violoncelliste solo phrase superbement son introduction de l'air de Philippe.

Un plateau soigné 

Les seconds rôles puisent largement dans le vivier de l'Académie et du Choeur : les moines de Jean-François Gay, Alain Sobieski, Paul-Henry Vila, Christophe De Biase, Florent Karrer, les députés flamands (Dominique Beneforti, Charles Saillofest, Antoine Saint-Espes, Paolo Stupenengo, Denis Boirayon, Thibault Gerentet), le Héraut royal de Didier Roussel, la voix d'en haut de Caroline Jestaedt, mais aussi le Comte de Lerme de Yannick Berne et même le Thibault de Jeanne Mendoche. Certaines voix sont plus vertes que d'autres, mais les dictions sont excellentes.

Patrick Bolleire assure le rôle du Moine avec son soin habituel, clarté du texte, présence malgré la brièveté du rôle.
Roberto Scandiuzzi est un Grand Inquisiteur de luxe, après tant de Philippe interprétés partout. Sa voix sombre et profonde sait trouver des accents menaçants pour manifester l'autorité dangereuse du personnage.
Avec Rodrigue, Stéphane Degout campe son premier personnage verdien. Coup d'essai, coup de  maître. Outre ses atouts bien connus de diction parfaitement intelligible, de style impérial, il montre aussi une émotion maîtrisée qui confirme les talents du chanteur acteur. On se plaît à rêver aux futures étapes de sa carrière verdienne.
Sergey Romanovsky est un Don Carlos expressif, au style élégant, qui sait tirer parti de délicats aigus en demi-teintes. L'émotion, l'exaltation sont présents, justement dosés. Et, si la voix n'est pas immense, il sait l'utiliser avec intelligence.

Après le plus modeste Thibault à Paris (mais sa Brangäne ici même), voici Eve-Maud Hubeaux en Eboli, pleine d'énergie sur son fauteuil roulant, aussi à l'aise dans les  mélismes de l'air  du  voile que dans la douleur tragique du Don Fatal.

Sally Matthews chante Elisabeth avec soin et une voix opulente, même si on la sent moins à l'aise avec le français. Beaucoup de dignité dans l'expression de l'amour blessé, et l'artiste sait mettre son vibrato au service de la composition.
Philippe II, c'est Michele Pertusi qui montre un français impeccable. Sa voix de plus en plus ample et sombre convient parfaitement aux tourments du roi mal-aimé, tout en gardant les accents d'autorité. Les duos avec Posa et l'inquisiteur sont des moments passionnants de chant et de théâtre.
Très belle représentation,  complètement différente de celle de Paris, mais non moins passionnante.

6 commentaires:

  1. Very interesting post from a connoisseur!

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  2. Thank you very much, dear Anonymous !

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  3. Il est toujours extrêmement intéressant, effectivement, d'avoir l'avis d'un amateur éclairé.

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  4. Still very inspiring, the connoisseur review !
    Annie

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